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notices bibliographiques

raconte une histoire analogue : Darwin se levant au milieu de la nuit pour rectifier un détail donné par lui inexactement et qu’il pensait avoir quelque importance au point de vue d’une hypothèse sur le sublime.

La partie la plus intéressante du volume au point de vue philosophique et psychologique paraît être celle qui se rapporte à la publication de l’Origine des Espèces et à l’accueil qui fut fait à cet ouvrage. On trouve, dans l’exposé de M. Huxley et dans les lettres de Darwin lui-même, des renseignements très curieux et fort utiles pour connaître soit la nature mentale de Darwin, soit celle de l’homme en général. L’idée de la sélection naturelle nous paraît aujourd’hui extrêmement simple et claire, et elle l’est en réalité, et pourtant des esprits distingués eurent, à l’époque où Darwin l’exposa, une grande peine, je ne dis pas à l’admettre, mais à la comprendre. Les associations ordinaires impliquées par le mot sélection troublaient d’une manière instructive l’intelligence des lecteurs. « Si j’avais à recommencer de novo mon livre, écrivait Darwin, au lieu d’employer le terme de sélection naturelle, j’emploierais celui de préservation naturelle, car Harvey (de Dublin) et d’autres encore ne peuvent arriver à me comprendre, et Harvey a pourtant lu deux fois mon livre. Le Dr Gray, du British Museum, m’a fait remarquer que « la sélection est évidemment impossible avec les plantes ! Personne n’a pu lui dire comment cela pouvait être possible » ; et il peut ajouter maintenant que l’auteur lui-même n’a rien fait pour le lui dire. Notre compatriote Flourens se signala aussi par la façon dont il ne comprit pas la sélection naturelle. Il serait intéressant de trouver, à côté des mauvaises interprétations de la théorie de Darwin faites par ses adversaires, celles qui ont été commises par ses partisans.

Il faut signaler encore pour leur intérêt psychologique les réponses faites par Darwin pour les enquêtes psychologiques de M. Galton et qui ont rapport à l’éducation, à l’hérédité, à diverses facultés, et en dernier lieu au pouvoir de visualiser. Le reste du volume offre surtout un intérêt spécial. Les botanistes, par exemple, y trouveront un grand nombre de lettres sur des sujets divers.

Le volume se termine par des appendices sur l’enterrement à l’abbaye de Westminster, les portraits de Darwin, les honneurs qui lui ont été décernés, les Sociétés dont il faisait partie ; l’appendice II donne la liste de ses travaux. Enfin un index alphabétique permet de trouver ou de retrouver les renseignements dont on a besoin.

F. P.

Dr Emil Reich. — Schopenhauer als philosoph der Tragödie Eine kritische Studie. (Schopenhauer comme philosophe de la tragédie. Étude critique.) Wienne, Konegen, 1888, 139 p.. in-8o.