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temps une pose communiquée, cela est dû à l’absence de l’impression douloureuse de fatigue qui fait baisser le bras bien avant le véritable épuisement neuro-musculaire : et à la fatigue on pourrait ajouter, comme causes déprimantes, l’ennui, l’énervement, la mollesse de la volonté, etc.

Chez les sujets qui présentent des mouvements inconscients très accusés, qui conservent, dans leur membre anesthésique par inconscience, non seulement la sensibilité tactile, mais la sensibilité à la douleur, on peut provoquer des phénomènes d’électivité qui paraissent démontrer que la sensation de plaisir est également conservée. C’est ce qui est facile à constater chez Amélie Cle… Si l’expérimentateur entrecroise ses doigts avec ceux de la main anesthésique, celle-ci serre fortement jusqu’à se contracturer, et en même temps on observe dans le reste du corps, qui se penche vers l’expérimentateur, des phénomènes d’électivité manifestes, comparables en tous points à ceux qui ont été observés pendant le somnambulisme. Ces phénomènes contrastent d’une façon piquante avec l’attitude psychique de la malade (personnalité principale), qui est, à l’état de veille, très réservée et un peu timide. Remarquons encore que, dans cette expérience, des mouvements inconscients du bras se généralisent à toute la moitié du corps. M. Pierre Janet a observé un fait du même ordre, dans les mêmes conditions.

IV

Les mouvements accomplis par le membre anesthésique, ainsi qu’on pourrait le prévoir par le raisonnement, participent à cette anesthésie ; au moment où ils s’exécutent, ils n’éveillent dans la conscience du sujet aucune des sensations kinesthétiques qui accompagnent le déplacement d’un membre sensible ; le sujet par conséquent ne perçoit pas, sans le secours de ses yeux, le déplacement de son membre, et il ne saurait connaître autrement que par la vue ni la production, ni la direction, ni l’amplitude du mouvement. Cette inconscience est tout aussi profonde lorsque le sujet détermine lui-même, par sa volonté, le mouvement de son membre anesthésique, que dans le cas où ce mouvement est une réponse aux excitations que l’expérimentateur a portées sur ce membre. Seulement, il y a une différence facile à comprendre entre les deux cas : si le mouvement est produit par une excitation extérieure, le sujet ne sent rien et ne se doute de rien ; il croira par exemple que sa main repose immobile sur ses genoux, tandis qu’en réalité elle serre un dynamomètre ou cher-