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Le même sujet étant endormi, on lui suggéra la pensée de commettre un vol, ce qu’il fit ponctuellement. La défense ayant été faite de se rappeler quoi que ce soit, l’oubli au réveil fut complet, et même l’ayant endormi pour lui arracher son secret, on ne put rien lui faire avouer.

Je fis alors l’expérience suivante ; je lui dis : « Endormez-vous vous-même pour vous rappeler toutes les circonstances du vol qui vous est reproché. »

Auch… s’endort, en appliquant sa main droite sur son front. Au bout de quelques instants, sa main se détache et retombe naturellement. Le sujet dort profondément ; le sommeil dure deux minutes comme il l’avait décidé lui-même avant de s’endormir ; il se réveille spontanément et raconte :

« Un monsieur qui m’a dit s’appeler Durand, m’a ordonné de prendre cette montre sur le bureau, de la mettre dans ma poche ; il a ajouté que personne ne me verrait, et m’a défendu de dire ce que j’aurai fait.

Le sujet donne le signalement exact de ce monsieur Durand, il rétablit la scène telle qu’elle s’était passée sans rien oublier.

Il reconnaît celui qui lui avait donné l’ordre d’agir, parmi un certain nombre de personnes, et il affirme sans la moindre hésitation et avec une grande assurance que tout ce qu’il dit est bien la vérité. Il sait qu’on lui a défendu de parler, mais il parle parce qu’il se rappelle.

Des expériences identiques ont été faites sur plusieurs sujets en présence de témoins compétents, en prenant toutes les précautions pour éviter les causes d’erreur ; toujours les résultats ont été identiques.

La conclusion qui semble se dégager, c’est que l’auto-suggestion permet au sujet de se rappeler toutes les circonstances d’un crime, malgré la défense qui lui a été donnée de se rappeler. L’auto-suggestion réveille les souvenirs effacés et est un correctif aux dangers de l’hypnotisme.


Nous avons le regret d’annoncer la mort d’un de nos plus jeunes et plus sympathiques confrères, M. Gaston Decaisne.

M. Decaisne a été emporté par une maladie rapide, presque foudroyante, hâtée sans doute par les nombreux chagrins domestiques qui l’avaient accablé en peu de temps.

Il avait fait une thèse remarquable sur les Paralysies corticales. Nous venions de le nommer membre de notre Société, et il est certain qu’il nous eût été d’un grand secours par son amour pour la science comme par la précision et la méthode de son érudition.

Ch. R.
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Le Propriétaire-Gérant, Félix Alcan.

Coulommiers. Typ. Paul Brodard et Gallois.