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respiration, le travail pour écarter les obstacles et éviter la douleur, l’amour, la sélection sexuelle, les sentiments de famille et de société ont modifié les fonctions et les organes bien plus que les influences extérieures. Ce sont eux surtout qui ont fait l’évolution des formes animales. Cette thèse est prouvée par les données les plus récentes de l’histologie, de l’embryologie, et surtout de la paléontologie.

III. G. de Leonardis : L’évolution esthétique. — L’art est la vie de l’esprit, la littérature est l’expression par la parole de la vie de l’esprit dans sa trilogie, qui est le vrai, le beau, le bien.


Rivista italiana di filosofia.

(Aprile-ottobre 1888.)

L. Ferri. La philosophie politique dans Aristote et Montesquieu. — La méthode est la même, chez ces deux génies si divers : c’est la méthode expérimentale. L’un, profondément philosophe, use avec puissance de l’analyse et de l’induction, s’élevant graduellement de l’individuel au particulier, du particulier au général, du général à l’universel ; l’autre, d’une aptitude singulière à l’érudition et aux travaux historiques, s’étend plus sur les faits qu’il ne s’élève dans l’ordre des idées, et ne regarde pas à la forme de la matière historique et aux fins qui dominent les événements. Mais il y a de commun entre eux que les faits sont la base de leurs travaux, l’histoire est leur guide, la nature leur autorité. L’un et l’autre, en même temps qu’ils étudient les rapports des lois avec les choses, ils embrassent l’étude des constitutions ; mais, à cet égard, les vues d’Aristote sont plus exactes et plus complètes que celles de Montesquieu : les idées de ce dernier sont assez confuses, par exemple, en ce qui regarde le fondement du despotisme et le fondement (l’honneur) de la république. Montesquieu n’a point changé les idées d’Aristote sur la fin suprême de l’éducation ; mais il ne présente aucun plan d’études publiques ; il observe, il décrit, et ne suggère pas les moyens de corriger et d’améliorer. En revanche, bien plus fécondes sont les recherches de Montesquieu sur les relations des lois avec le génie des peuples, avec les coutumes, les mœurs, la religion, le climat et le sol. Comme son devancier, il distingue les trois pouvoirs, législatif, exécutif et judiciaire ; mais il donne les raisons, la théorie des faits notés par Aristote. Plus heureux qu’Aristote, qui admire le passé et ne comprend pas le présent, il a le sens de l’avenir, et il en annonce l’avènement, quoique ses idées sur le progrès soient bien défectueuses. Enfin Aristote n’étudie que l’intégrité des gouvernements, tandis qu’Aristote montre leurs relations antérieures. En cela, Montesquieu a été mieux servi par les circonstances : aux cités décrites par le philosophe grec avaient succédé les vastes monarchies ; à leur isolement,