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ANALYSES.antal. Die hollændische Philosophie.

dans ces exercices, un travail considérable du cerveau, lequel produit et règle le mouvement des muscles. La gymnastique d’appareils, l’escrime, les jeux d’adresse ont du bon, mais non comme repos pour les nerfs, non pour les surmenés. Les mouvements qui reposent l’esprit, ce sont ceux qui s’exécutent sans l’intervention du cerveau, qui, régis par la moelle épinière, s’exécutent automatiquement, la marche, par exemple, ou l’exercice de l’aviron. Et qui ne sait que ces exercices mêmes reposent d’autant plus qu’ils sont plus purement automatiques ? La marche sur un terrain inégal ou dangereux fatigue à raison de l’attention qu’elle demande ; la rame lasse infiniment plus, quand au simple effort de mouvoir le bateau se joint pour le rameur le soin de le diriger. Les exercices difficiles sont préférables aux exercices automatiques quand il s’agit de faire l’éducation des centres nerveux, précisément parce qu’ils mettent vivement en jeu le cerveau, les sens, l’intelligence ; mais aux sujets dont il faut ménager le cerveau tout en fatiguant les muscles, ce qui convient, ce sont les exercices faciles, instinctifs, ou ceux qui sont devenus familiers au sujet par un apprentissage antérieur… « Tout, plutôt que les exercices savants et la gymnastique acrobatique. » Le Dr Lagrange finit par cette formule, qui exprime une des pensées auxquelles il tient le plus.

H. Marion.

G. von Antal. — Die hollaendische Philosophie im neunzenten Jahrhundert. Eine studie, Breijer, Utrecht, 1888, 112 p. in-8o.

Nous ne savons à peu près rien de la philosophie en Hollande dans ce siècle. La brochure de M. G. von Antal vient donc à point. Il n’est pas sans intérêt pour nous d’estimer au moins la valeur des hommes qui se sont adonnés, dans un pays si voisin du nôtre, à la recherche spéculative, lorsque leurs ouvrages mêmes ne méritent plus de nous attacher.

Il n’existe pas, avoue bien sincèrement M. G. v. A., une « philosophie hollandaise ». D’une manière générale, ajoute-t-il, on pourrait dire que les philosophes hollandais ont gardé le milieu entre l’idéalisme allemand et l’empirisme anglais, et qu’ils ont dirigé leurs spéculations vers des buts pratiques. Avec van Heusde, prévalut la tendance idéaliste ; avec Opzoomer, prévaut la tendance positiviste. Ces deux noms sont les premiers. Mais il les faut mettre en leur place pour les bien juger.

Dès la fin du xviiie siècle, le criticisme avait pénétré en Hollande. Il y fut soutenu par G. van Hemert et par le poète et philosophe J. Kinker, autour de qui se groupèrent Schröder, Matthes, Heumann, Servaas, Deimann, Doornik. Rhynvis Feith (1753-1824) ayant prêché en lourds alexandrins, contre le kantisme, la philosophie du sens commun, Kinker lui répliqua vertement. Christianus répondit à Kinker. Ce n’était que l’ouverture de la pièce : elle se joua entre D. Wyttenbach (1746-1830) et van Hemert (1756-1825). Wyttenbach (il est connu comme philologue) prit le rôle de Jupiter tonnant dans cette dispute, où abondaient les gros mots et les lourdes facéties.