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ANALYSES.lagrange. Physiologie des exercices du corps.

cas, il s’est inspiré largement de tout ce qui s’est dit à cet égard. On dirait qu’il a voulu en avoir le cœur net, tirer au clair la question pour sa satisfaction personnelle, et offrir du même coup à ceux qu’elle intéresse tous les éléments d’une solution scientifique. J’ai plus de raisons que personne de lui en savoir gré, ayant toujours tenu la question pour des plus graves et déploré de voir tant de gens d’une compétence problématique l’agiter avec passion et la trancher à la légère, quand, pour la traiter sérieusement, je sentais au vif le besoin d’une minutieuse enquête physiologique.

Mais les seuls surmenés ne sont pas les écoliers, et la fatigue scolaire n’est pas encore la pire. Une étude approfondie du travail sous ses aspects essentiels, de la fatigue sous toutes ses formes, des divers exercices en tant qu’épuisants ou réparateurs, s’adresse littéralement à tout le monde. À part les physiologistes de profession et peut-être les médecins, ceux du moins qui savent et qui pensent, tout lecteur, même très cultivé, a quelque chose à apprendre dans cette branche importante de l’hygiène, quelque profit à tirer de ce bon livre. Profit assaisonné de plaisir, car il est très clairement et agréablement écrit. La simplicité y est parfaite : beaucoup d’aisance et de naturel, usage discret des termes techniques, pas trace de pédanterie. On n’y voudrait qu’un peu plus de sobriété peut-être dans le développement, un peu moins de facilité et d’ampleur, et moins de redites (car il y en a), pour en trouver la forme précisément telle qu’on la souhaite dans les ouvrages qui ont pour but de donner crédit à la science auprès du public sans relâcher rien de sa dignité.

Dans la collection dont il fait partie, collection très inégale, mais dont le niveau moyen est si élevé, le livre du Dr Fernand Lagrange tient donc très honorablement sa place, au-dessous, assurément, de quelques œuvres de premier ordre, dans lesquelles les maîtres, quelquefois les créateurs d’une science, un Berthelot, un Marey, un Huxley ou un Tyndall ont consigné leurs propres découvertes, mais fort au-dessus de quelques autres. Il combine dans une très heureuse proportion la théorie et l’expérience, donnant l’explication des faits toutes les fois qu’on la possède, la proposant avec réserve, quand on ne peut que la conjecturer, mais retenant toujours les faits eux-mêmes, accumulant les observations, au besoin les anecdotes, exprimant en traits vifs ce qui est certain et à retenir, dégageant avec soin les enseignements empiriques à défaut d’autres.

Dans le peu de lignes que je puis consacrer ici à un livre qui ne touche à la philosophie que très indirectement, je ne sais en vérité sur quels points fixer l’attention. Tout est à lire et à méditer : peu de traités spéciaux de biologie donnent de la vie et de son mécanisme une idée aussi saisissante. Bien des traités pratiques d’hygiène ne sont pas une mine aussi riche de faits qui font penser et d’idées qui restent.

Sur la question du surmenage scolaire, dont je parlais, et qui est sans doute une de celles qui offrent l’intérêt le plus général, l’attitude