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dans les manifestations psychiques de l’animal, du sauvage, de l’enfant. Leur développement progressif peut être suivi, grâce à l’étude de ce dernier, dans sa marche à travers les âges de la vie. Les différences que les circonstances externes provoquent d’ordinaire dans une même manifestation mentale, il peut les saisir dans l’étude des races et dans les évolutions de l’histoire. Les déviations du type normal ont leurs tristes exemplaires dans les déments de toute classe et les criminels de naissance. Ainsi la psychologie ne se limite pas, ne peut se limiter à scruter la conscience d’un homme adulte, de race supérieure et de forte instruction ; elle étudie tous les états mentaux au dedans et au dehors de la conscience, elle tient compte de tout l’organisme ; elle établit ses relations, forme peut-être sa théorie, et alors compare, du point de vue de son problème spécial, l’homme individuel avec l’homme en général, avec tout ce que les actes, le langage, l’industrie, l’art, la religion, les associations, les migrations des hommes dans le temps et dans l’espace découvrent de cette vie intime qu’il se propose de connaître. Toutes ces relations et chacune d’elles, dans l’espèce et dans l’individu, sont des relations du sujet avec l’objet ; il faut les épuiser pour entrevoir dans quelles formes infinies l’objet sollicite l’esprit ; pour tenter quelque réduction, simplification ou coordination au milieu de ce chaos ; pour découvrir quelques lois, c’est-à-dire par où se ressemblent, comment coexistent, comment se succèdent ces phénomènes doubles, enfin pour que chacun puisse arriver à répondre à cette question : De quelle manière le monde est-il ma représentation (pp. 17-19) ? »

Nous connaissons la méthode, le point de vue général de l’auteur, et aussi les hautes qualités de son esprit ferme et lucide. Pour donner de son livre une idée plus complète, je ne crois mieux faire que de reproduire ses conclusions, résumées dans un tableau très simple, qui nous montre les lois auxquelles les recherches indiquées ci-dessus ont abouti.

« Objet étudié : Un organisme hérité qui s’adapte : à son milieu, grâce à des fonctions spéciales dont les actes ont ce caractère d’être successifs et graduellement conscients.

« Fonctions : A. Présentation : a. sensation ; b. perception ; c. commotion. — B. Représentation : a. image ; b. idée (notion, jugement, raisonnement) ; jugement (distinction, ressemblance, contiguïté, causalité) ; c. émotion.

« Fonctions (suite) : C. Actuation : a. appétition ; a’. délibération ; b. détermination ; c. action.

« Lois de ces fonctions : Loi de l’être : retenir l’utile, repousser le nuisible, avec la moindre dépense d’effort. D’où se dérivent : a. la loi d’hérédité ; b. la loi d’adaptation ; c. la loi du moindre effort.

« Lois secondaires : A : a. La loi de relation : l’organisme se sent affecté par tout changement en degré ou en espèce de ses impressions ; b. loi de conservation, l’organisme conserve la trace de ses impressions ; — a. loi de progression ; a. de tension, b. de dégradation, des sensations