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élément qu’il appelle plastide, ou bien d’éléments toujours identiques entre eux. Les descendants de ces Protistes étaient des sphères pleines ou creuses, formées de plastides ou cellules associées et qu’on nomme morula si toutes les cellules sont semblables, et planula si elles sont de deux sortes. Puis la forme commune à tous les animaux affectait la forme d’un sac à double enveloppe, formé par simple creusement de la morula et de la planula. C’est cet être hypothétique, réduit à un tégument et un estomac, cette gastréade qui pour Hæckel est l’ancêtre commun de toutes les formes animales. À partir de ce stade embryogénique dit gastrula, les diverses branches commencent à s’écarter du tronc commun. Si la larve gastrula, jusqu’alors errante dans la mer, tombe au fond et se fixe, elle donne naissance aux rameaux de Éponges et des Polypes, dont les types inférieurs rappellent encore la forme d’un simple sac à une seule ouverture. Si la larve reste libre, elle fournit le rameau des Vers auquel se rattachent tous les autres groupes d’animaux.

Nous ne pouvons pas, dans un résumé aussi succinct, suivre Hæckel dans le détail de son exposé phylogénétique ; nous ne pouvons pas non plus reproduire les 22 termes de la série généalogique qu’il propose pour l’espèce humaine ; nous ne pouvons mieux faire que de renvoyer à l’analyse de M. Perrier, dont nous croyons cependant devoir citer les réserves au sujet des résultats obtenus par le savant allemand. « En dehors de la part considérable d’hypothèses qu’elle contient, la phylogénie de Hackel laisse de côté bien des faits qui étaient déjà définitivement admis en 1877, date de la publication de l’édition française de l’Anthropogénie, dont les principes avaient été professés dès 1873 à Iéna.

« Hæckel, dans ses leçons, s’était en effet peut-être un peu trop préoccupé des formes embryonnaires, pas assez des formes adultes que celles-ci doivent, en définitive, réaliser. »

Ces quelques lignes suffisent pour expliquer pourquoi bien des zoologistes, même parmi les partisans les plus convaincus de l’évolution, refusent d’accepter les considérations phylogénétiques de Hæckel ; pourquoi d’autres, bien qu’en acceptant les principes, ont constitué des arbres généalogiques notablement différents. La critique faite par M. Perrier des théories hæckeliennes prépare enfin l’exposition des derniers résultats de la zoologie moderne, et des idées personnelles que l’auteur a développées dans la seconde partie de son ouvrage.

Aux yeux de M. Perrier, une explication quelconque des phénomènes naturels, pour avoir une valeur scientifique, doit être dégagée de toute considération a priori, de toute appréciation de sentiment ; elle doit, à l’exemple des théories des sciences physiques, résulter de l’exposition des phénomènes présentés dans un ordre logique, c’est-à-dire en s’élevant des plus simples aux plus compliqués. La méthode la plus généralement suivie jusqu’à ces dernières années dans les sciences naturelles diffère de la précédente en ce qu’elle pose en principe qu’il faut toujours