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les deux produits ont le même volume et la même qualité. Tel est le seul mode de division nucléaire qui nous soit connu. Si le noyau formait des globules polaires pour expulser des plasmas ancestraux, un tel résultat ne pourrait être atteint au moyen d’une simple division équationnelle, et il faudrait que la division fût réductionnelle. On ne connaît rien dans la biologie cellulaire qui ressemble à ce phénomène hypothétique. Et puis, comment pourrait se faire ce départ entre des plasmas de date différente ? Ce sont là des objections assez graves, et il serait malaisé d’y répondre.

Telle est, très en raccourci, la théorie de Weismann sur la formation des globules polaires chez les œeufs fécondables. Il existe, avons-nous vu, des œufs qui ne produisent qu’un seul globule polaire : ce sont les œufs parthénogénésiques, se développant sans fécondation. Balfour croyait que ces œufs ne produisent pas de globules polaires, et il en tirait un argument en faveur de la théorie de l’hermaphrodisme du noyau. Il admettait que l’élément mâle non expulsé sous forme de globule polaire servait à féconder l’œeuf parthénogénésique. L’année dernière, Weismann et un de ses élèves, Ischikawa, de Tokio (Japon), ont découvert chez plusieurs types parthénogénésiques un globule polaire : par exemple dans les œufs d’été des Daphnides, dans les œufs parthénogénésiques des Cypridiens et des Rotifères[1]. Il n’est que juste de rappeler à cette occasion que la première observation de globule polaire chez un œuf parthénogénésique appartient à M. Billet, élève de M. le professeur Giard[2]. Suivant Weismann, ce globule polaire unique correspond au premier globule polaire d’un œuf fécondable ; il consiste dans l’expulsion de sa substance ovogène. Pourquoi ne se produit-il pas un second globule polaire, destiné à expulser une partie du plasma germinatif ? C’est inutile, puisque, en l’absence de fécondation, il n’est pas nécessaire de faire de la place aux plasmas nouveaux qui, dans les conditions de la fécondation, sont introduits dans la vésicule germinative par le zoosperme.

Weismann a tiré de ces faits des déductions intéressantes relativement à l’hérédité. C’est ainsi qu’il explique comment toutes les cellules sexuelles d’un individu ne renferment pas les mêmes propriétés. Chaque œuf est différent des autres, car la réduction des plasmas ancestraux ne se fait pas d’une façon identique, et la qualité et la nature des plasmas conservés ne sont pas les mêmes. On peut expliquer ainsi les différences que présentent entre eux les enfants d’un même couple.

  1. Ueber die Bildung der Richtungs-Körper bei thierischen Eiern, 1887.
  2. Bulletin scientifique du département du Nord, 6e année, 1883.