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BALBIANI.de la génération et de l’hérédité

ration très précoce entre les cellules somatiques, car la séparation a lieu dès le stade de gastrula.

Dans un autre groupe de vers, chez l’Ascaris, les cellules sexuelles se différencient de meilleure heure encore. L’Ascaris megalocephala est un ver qui a acquis une certaine célébrité par suite des observations dont il a été l’objet. Il vit dans l’intestin du cheval ; lorsqu’il a pondu ses œufs, le travail de segmentation n’est pas encore commencé, c’est au dehors qu’il commence. Au stade 4 de la division de l’œuf, les cellules sont semblables, elles présentent toutes un noyau volumineux contenant de la matière chromatique (nous verrons plus loin quelle est la nature de la chromatine ; disons seulement ici que cette substance, qui est contenue dans le noyau sous forme de réseau, doit son nom à la propriété qu’elle possède de fixer les réactifs tinctoriaux). Au stade 8 de la segmentation, on peut déjà reconnaître les deux cellules sexuelles ; leur noyau a conservé les caractères des noyaux primitifs, ils contiennent beaucoup de chromatine ; dans les six autres cellules, le noyau a rejeté une grande partie de sa chromatine, et il se teint très faiblement par les réactifs colorants ; on retrouve de petits globules de chromatine épars dans le protoplasma de ces six cellules ; ces petits globules sont en voie d’être éliminés par résorption.

On retrouve les deux cellules sexuelles dans tous les stades subséquents. Le ver étant arrivé presque au terme de son développement, si on le fixe et si on le colore, on décèle la présence de ces deux cellules sexuelles ; elles occupent constamment le point où se formera plus tard l’appareil sexuel adulte. On trouve chez quelques Insectes une précocité encore plus grande dans l’apparition des cellules sexuelles primitives. Chez un Diptère, le Chironomus, récemment étudié par M. Balbiani[1], l’œuf contient un vitellus, qui peu d’instants après la ponte se condense, ce qui produit aux deux pôles opposés de l’œuf une chambre, un espace vide entre le vitellus et la membrane d’enveloppe. Le vitellus s’entoure d’une masse de plasma homogène ; à la surface de cette masse, on voit bourgeonner au pôle postérieur un petit globule, puis un second ; ces deux globules tombent dans la chambre polaire postérieure. Ce sont deux cellules, contenant chacune un noyau, qu’on peut rendre apparent par l’acide acétique. Chacune de ces cellules se divise deux fois successivement, d’où un groupe de huit cellules qui sont entièrement détachées de l’œuf ; ces huit cellules représentent le futur appareil génital de l’insecte. Il n’y a, au moment de leur formation, encore aucune trace d’embryon ni même de blastoderme. Ainsi, les

  1. Recueil zoologique suisse, t.  II, 1885.