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couche interne (Kleinenberg)[1] : de là elles se rendent dans les gonophores, où elles achèveront de mûrir. On comprend, sans qu’il soit besoin de recourir à une figure, que cette migration des cellules sexuelles dans la colonie d’un hydraire est d’autant plus étendue que les cellules naissent dans un point plus éloigné du lieu de leur destination ; celles qui se forment à l’extrémité périphérique du rameau ont un très petit chemin à parcourir ; au contraire, celles qui naissent sur un point plus central du rameau ou même sur le tronc sont obligées de faire une migration plus étendue. Ces faits prouvent l’indépendance qui existe entre les éléments générateurs et l’organisme-souche qui les porte. Les cellules sexuelles primitives des Hydraires sont d’abord des cellules somatiques ; elles font partie d’un tissu, d’un épithélium, de l’ectoderme ; puis elles se détachent de l’ectoderme ; à leur état de repos, succède un état vagabond, comme celui d’un parasite qui circule dans l’organisme qu’il a envahi.

Nous arrivons maintenant à l’embranchement des Vers, dans lequel nous n’étudierons que deux types d’animaux, le Sagitta et l’Ascaris.

Le Sagitta fournit un sujet d’étude très intéressant en raison de l’époque très précoce où apparaissent les cellules sexuelles. Les Sagitta appartiennent à la famille des Chætognathes ; ce sont des organismes libres, assez petits, ayant la forme d’une flèche. Ils sont hermaphrodites. L’œuf mûr du Sagitta est un petit corps sphérique, entouré d’une membrane vitelline assez épaisse ; il se segmente, et produit une blastula, qui, par invagination, forme une gastrula, ou sac à double enveloppe. La gastrula présente deux feuillets, l’un externe, l’ectoderme, l’autre interne, l’endoderme, qui n’est autre chose que l’ectoderme invaginé de la blastula. C’est aux dépens de l’endoderme que naissent les premières cellules sexuelles. Au centre de l’invagination, deux cellules se différencient des autres. À un degré plus avancé, elles sortent en dehors de l’endoderme, et se pladent au fond de la gastrula. Bientôt, elles se divisent chacune, et donnent naissance à un groupe de quatre cellules qui forment une petite plaque : les deux cellules moyennes deviennent le testicule, et les deux extrêmes forment l’ovaire.

Ainsi, chez le Sagitta, les deux cellules sexuelles primitives se forment par différenciation de l’endoderme, comme chez les Orthonectidés. Cet endoderme n’est cependant pas l’endoderme définitif du tube digestif du ver. C’est l’endoderme primitif ou de sa première forme embryonnaire. Les Sagitta nous donnent l’exemple d’une sépa-

  1. Zeitsch. f. wiss. Zool., t.  XXXV, 1883.