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LES THÉORIES MODERNES DE LA GÉNÉRATION ET DE L’HÉRÉDITÉ[1]


I

La reproduction a été souvent comparée à un autre phénomène biologique élémentaire, la nutrition. En 1867, Claude Bernard disait déjà : « Dans sa forme la plus simple, la reproduction se confond avec la nutrition. » En effet, la nutrition a comme conséquence immédiate la croissance, et c’est parce que la croissance est limitée, que la reproduction a lieu ; la reproduction, peut-on dire avec von Baer, est une croissance de l’individu au delà de ses limites naturelles ; en d’autres termes, c’est une multiplication de l’individu par division. La particule qui se détache par division de l’animal préexistant est dans certains cas d’un volume relativement considérable, égale à la moitié du corps, ou, dans d’autres cas, très petite, et désignée sous les noms d’œuf, de germe. Ces particules détachées deviennent le siège d’une croissance rapide.

Dans certains cas, la reproduction est précédée par une fécondation, qui sert à donner en quelque sorte une impulsion nutritive au phénomène. À ce second point de vue encore, on a continué le parallèle entre la nutrition et la reproduction. On a même été jusqu’à comparer la fécondation à un mode de préhension des aliments. Rolph avait donné à la fécondation le nom d’isophagie. Pour lui, l’instinct sexuel qui rapproche les deux éléments fécondateurs, l’ovule et le spermatozoïde, est analogue à celui de la faim, et

  1. Nous avons reçu de M. Balbiani l’autorisation de publier un résumé du cours que l’éminent professeur du Collège de France a consacré, pendant le semestre d’été 1888, à l’étude de la Génération et de l’Hérédité. Il nous a semblé que ces deux grands problèmes, qui présentent une si haute importance pour la philosophie biologique, ne manqueraient pas d’intéresser les lecteurs de la Revue. Alfred Binet.