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très spirituelle (geistreiche) de la nation. La spéculation, ajoute-t-il, cède la place au mouvement positif et critique.

G. Gutberlet. La psychologie sans âme. — Gutberlet examine le travail de Herzen (Grundlinien einer allgemeinen Psycho-Physiologie), qui, de la dépendance évidente des fonctions spirituelles à l’égard des fonctions corporelles, tire une preuve suffisante de l’identité de l’âme et du corps. Exposant d’abord la preuve expérimentale tirée des changements de température qui suivent les actes psychiques et cherchant ce qui résulte de ces expériences, Gutberlet admet qu’un changement corporel suit toujours la pensée, sans qu’on puisse en conclure le moins du monde que le processus de la pensée est corporel. Se demandant ensuite si la durée dans la conscience de la sensation est une preuve en faveur du matérialisme, il soutient que la sensation n’étant pas une espèce de mouvement ne peut être saisie que par la conscience, que si dans le monde matériel, tout état, toute modification d’état est mouvement ou transmission de mouvement, un substratum immatériel doit servir de fondement aux actes psychiques. Le temps physiologique ne prouve rien contre cette dernière affirmation, car on pourrait bien plutôt en supposer la prolongation par l’intercalation d’un agent immatériel. Le temps requis pour conduire l’excitation par les nerfs jusque dans le cerveau et pour exciter un grand nombre de ganglions cérébraux demeure tout à fait le même, que ce soit le cerveau ou une âme dans le cerveau qui sente. Or, l’excitation cérébrale n’est pas suffisante, la sensation doit naître d’abord dans l’âme, de manière à devenir consciente, ce qui exige un certain intervalle, qui peut même être très considérable, si l’âme n’a pas déjà son attention dirigée sur la sensation attendue : la durée de la sensation n’exclut donc pas, mais bien plutôt confirme l’existence d’une âme immatérielle. Gutberlet fait remarquer ensuite qu’on ne pouvait autrefois en physiologie parler d’une âme sans s’exposer à ne plus être considéré comme un savant ; il montre qu’il n’en est plus de même aujourd’hui, que la matière et son mouvement ne paraissent plus tout expliquer et il cite Hœckel, Virchow, Rindfleisch, Ranke, Cohn, Bunge, etc. Enfin se plaçant à un point de vue général, il croit pouvoir soutenir avec confiance que les Grundlinien de Herzen ne sont pas en état de fonder une psychologie sur des fondements purement physiologiques, c’est-à-dire une doctrine de l’âme sans âme ; il omet les preuves tirées de l’activité psychologique qui le conduiraient trop loin et cite, du côté des naturalistes, l’essai de Schmick (Die Unsterblichkeit der Seele naturwissenschaftlich und philosophisch begründet) qui aurait pu prouver scientifiquement l’immortalité de l’âme, s’il ne s’était mis en opposition avec le christianisme.

Kaderavek. De l’origine de nos concepts. — L’auteur, partant de la définition nominale du concept, acte primitif de la pensée humaine, examine successivement le système des idées innées, celui du matérialisme, du sensualisme et de l’empirisme intellectuel, le traditionalisme