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tance à tout changement dans l’état de mouvement ou de repos, la grandeur de la résistance à toute cause accélératrice positive ou négative. Cette résistance est limitée ; il faut la mesurer par une durée, car elle finit toujours par être vaincue à l’aide du temps. Dans l’air, les corps les plus lourds tombent le plus vite ; dans le vide, ils tombent ensemble ; c’est-à-dire que leur résistance inégale est surmontée par des forces inégales, car, soumis à l’action d’une même force, les plus légers prendraient les plus grandes vitesses. La masse d’un corps est donc en raison inverse de l’accélération que lui imprime une force donnée. La masse mesure l’inertie, comme le poids mesure la force de gravitation dans un lieu donné. Ainsi la masse, grandeur absolue, se mesure par le poids, qualité variable et relative. La notion pure de la masse, c’est-à-dire d’une résistance propre à empêcher des vitesses infinies sous le moindre effort, n’est pas familière au grand nombre, parce que les seuls astronomes ont l’occasion d’étudier le mouvement des corps à l’état libre.

L’action de la force sur une masse libre y produisant une vitesse impérissable, en continuant à se dépenser elle produit une vitesse additionnelle, et son application uniforme se traduit par une accélération continue. Toute force développe son action à la condition expresse d’un rapprochement matériel et en vertu de ce rapprochement. Le chemin parcouru par le point d’application d’une force est par là du même ordre d’importance que la grandeur de celle-ci : le produit de ces deux quantités mesure le travail. La masse n’est pas une force et la force n’est pas une qualité de la masse, autant dire la variation qualité de la permanence ; mais certaines forces sont unies à la masse pour constituer la variété de la matière. La force est donc un élément de chaque matière, élément expulsé peu à peu à chaque combinaison nouvelle des masses chimiques. Les forces pourraient n’être que la distance qui sépare les atomes d’une matière unique et universelle.

Ainsi la cause des mouvements quelconques est la force, et la cause de la force elle-même n’est autre chose que la distance initiale des masses, corps célestes, atomes chimiques indifféremment. L’action d’une force constante sur la vitesse est uniforme dans le temps ; mesurée par secondes, l’accélération qu’elle produit est égale à la vitesse acquise à la fin de la première seconde en partant du repos. Si dans cet instant le corps se meut avec une rapidité qui lui ferait franchir 1 mètre par seconde, il aura acquis celle de 2 mètres par seconde à la fin de la deuxième, et ainsi de suite.

La force demeurant constante, des espaces toujours plus considérables sont donc traversés en des temps égaux ; par conséquent l’accélération ne peut pas être proportionnelle aux espaces parcourus, mais elle doit diminuer, puis que l’accélération est proportionnelle au temps et que chaque nouvelle unité d’espace est franchie dans un moindre temps. Plus la vitesse augmente, plus diminue l’accélération acquise dans le temps nécessaire pour franchir un espace donné, ce qui enlève à l’accélération toute liaison fixe avec l’espace. La vitesse totale s’accroît