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ANALYSES ET COMPTES RENDUS


E. Pellis. La philosophie de la mécanique : in-fo, Paris, F. Alcan. La philosophie de la mécanique nous semble mériter son titre, qui est fort beau. M. Edouard Pellis, ingénieur, s’applique à y justifier par des raisonnements serrés et des calculs algébriques les vues de son ami Laggrond sur « l’univers, la force et la vie » dont il s’était fait l’éditeur l’an passé. Nous essayerons de dégager les thèses principales d’une exposition déjà très succincte.

I. Notre monde est une suite de phénomènes, c’est-à-dire de changements ; nous ne percevons que ces changements : c’est le travail chimique de l’astre qui le rend visible, et le mouvement de notre œil qui discerne les formes de l’édifice et du rocher. Cependant les phénomènes n’existent pour nous qu’en se distinguant les uns des autres et l’unité de chacun d’eux implique en lui quelque chose de stable. Il y a plus : nous trouvons dans les phénomènes une partie qui existait dans les précédents et se retrouvera dans les suivants, leur succession se produit par de simples combinaisons des parties constantes. L’auteur nomme celles-ci puissances, et plus souvent entités. Il en distingue deux : la force et la masse, dont la quantité persiste intacte dans la chaîne des événements. Ces deux entités sont relatives l’une à l’autre ; le rôle de la force consiste à déplacer les masses, dont le mouvement se mesure dans le temps et prend le nom de vitesse. Pourquoi cette vitesse n’est-elle pas infinie ? — Ce n’est pas ensuite d’une opposition de forces agissant dans des directions différentes, cette lutte produirait une résultante absolument déterminée et non point un ralentissement. La résistance à l’impulsion de la force est donc une propriété de la masse elle-même, et la tentative de ramener à l’unité le dualisme des puissances mécaniques ne saurait aboutir. On s’abuse en représentant l’atome matériel comme un pur centre de forces ; la masse est un élément de résistance, mais toute résistance n’est point une force, le temps laisse intacte la résistance des forces et vient à bout de la résistance des masses libres, dont s’accuse et s’impose ainsi l’entité spéciale. La force pousse, la masse retarde ; c’est toujours la présence de la masse qui engendre la durée des choses ; la masse est l’unique propriété stable de la matière. Nous ne définirons pas la masse par la résistance au mouvement, puisque le mouvement d’un corps persiste indéfiniment à l’état libre ; c’est la résis-