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de s’en convaincre. Si on développe une image consécutive occupant le milieu du champ visuel et qu’on porte le regard vers la droite, l’image consécutive se déplacera dans le même sens ; mais on ne l’extériorisera pas à droite, comme on le ferait pour un objet, qui, dans la position donnée à l’œil, ferait son image sur le même point que l’image consécutive.

Il est encore plus facile de comprendre comment on peut se représenter complet un objet dont on n’a vu que la moitié. M. C… ne voit la moitié de l’objet que lorsqu’il fixe son regard sur le milieu de l’objet ; mais dans tous les autres cas il voit l’ensemble, et c’est cet ensemble qui se grave dans sa mémoire. Si M. C… peut se rappeler l’ensemble de l’église de Dourdan, qu’il a perçue avant son accident, c’est que son acte de perception n’a pas été instantané, que très probablement, pendant qu’il regardait l’église, son œil était mobile et qu’à un certain moment l’image entière de l’église s’est peinte sur la moitié gauche de sa rétine et s’est emmagasinée dans la moitié de son centre visuel qui est restée saine.

Nous croyons qu’il serait intéressant de savoir s’il existe relativement à ces divers points des différences individuelles, et nous convions les cliniciens qui auront l’occasion d’étudier des cas de cécité verbale ou de migraine ophtalmique accompagnés d’hémianopsie, à soumettre les malades à un examen régulier, pour constater l’état de la mémoire visuelle.

Alfred Binet.