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scientifique on doit donc trouver la relation de cause à effet ou de détermination. Quelques-uns, pour sauver le principe de la subordination de la philosophie à l’expérience, disent bien qu’il n’y a là qu’une induction ; mais, en pratique, ils sont sur ce point d’un dogmatisme absolu.

A. Comte dit que l’esprit mathématique consiste à regarder comme liées entre elles toutes les quantités que peut présenter un phénomène ; il ajoute : « La définition à laquelle nous venons d’être conduits, si on écarte la circonstance de la précision des déterminations, n’est autre chose que la définition de toute véritable science quelconque ; car chacune n’a-t-elle pas, nécessairement, pour but de déterminer les phénomènes les uns par les autres, d’après les relations qui existent entre eux ? Toute science consiste dans la détermination des faits… On peut même dire, généralement, que la science est destinée à dispenser, autant que le comportent les divers phénomènes, de toute observation directe, en permettant de déduire, du plus petit nombre de données immédiates, le plus grand nombre de résultats. » Nous ne nous arrêterons pas à discuter, mot par mot, cette étrange théorie. Suivant son habitude, A. Comte passe à côté de la difficulté ; il faudrait savoir ce que sont ces données et ces quantités dont il parle : que veut-il dire par détermination des phénomènes les uns par les autres ?

II

Dans son livre sur la Probabilité des jugements, Poisson nous apprend que les géomètres ont été amenés à donner au mot cause un sens un peu différent de celui qui résulte de sa première définition. Il soutient, d’ailleurs, que dans la théorie des probabilités, le sens du mot cause a été généralisé et non transformé.

Supposons des urnes A, A′, renfermant, la première, a boules blanches, b boules noires, la seconde a′ blanches, b′ noires, etc., on tire une boule d’une urne quelconque et il se trouve qu’elle est blanche : on demande quelle est la probabilité que cette boule provienne de l’urne A. C’est ce qu’on appelle déduire la probabilité d’une cause de l’observation des événements.

II est clair qu’il faut abandonner toutes les idées précédentes. Nous n’avons plus de cause dans le sens anthropomorphique (volonté ou force occulte), ou dans le sens matérialiste (communication de mouvement par le contact). Nous devons faire des énumérations complètes de tous les événements compatibles avec la donnée, et séparer ceux qui correspondent à l’urne A. Il ne s’agit donc ici que de