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la Riparazione alle vittime del delitto, par M. Garofalo, écrit développant cette idée souvent émise, et avec raison, par l’auteur, que la plus efficace des peines, pour les petits délinquants, consisterait en dommages-intérêts prononcés d’office et payés obligatoirement en argent ou en travaux. — Louons encore Polizia e delinquenza in Italia, par M. Alongi, l’auteur d’une intéressante monographie sur la maffia sicilienne. Ces études de police importent à la psychologie criminelle par la même raison que l’art de la chasse, pratiqué par des Leroy, a servi aux progrès de l’ornithologie et de l’histoire naturelle en général.

Pendant que l’école positiviste d’outre-mont continue son évolution, l’école française rivalise avec elle d’activité et se distingue par le caractère solide, sérieux, modéré, de ses recherches. Les Archives d’anthropologie criminelle du docteur Lacassagne apportent tous les deux mois des contributions importantes, soit aux problèmes de criminalité par des articles tels que ceux de M. Bournet sur la criminalité corse (à rapprocher de En Corse, par Paul Bourde, livre stupéfiant d’informations), soit aux questions relatives à la preuve judiciaire, par des monographies sur le Dépecage criminel de M. Lacassagne, sur le fonctionnement du service des signalements anthropométriques de M. Bertillon, sur l’hypnotisme et la médecine légale de Ladame, soit enfin aux questions si délicates de responsabilité par une magistrale théorie de la responsabilité, incomplète à notre sens, mais remarquable surtout dans sa partie historique[1], de M. Paul Dubuisson, etc. Aux écrits publiés dans ce recueil peuvent être rattachés ceux qui émanent des élèves de son savant directeur, par exemple, de l’Empoisonnement criminel, par le docteur Georges Benoist. On y voit, par l’histoire de ce crime, fort bien traitée, à quel point le courant de l’imitation est prépondérant dans la direction choisie par les instincts malfaisants, et aussi combien le déplacement de ces courants dans un sens ou dans l’autre, vers le poignard, l’arme à feu ou le poison, vers les poisons animaux, végétaux ou minéraux, dépend d’une découverte qui a rendu relativement moins efficace ou plus dangereux l’emploi d’un procédé antérieurement adopté. Pourquoi le règne des douze Césars est-il marqué par une épidémie d’empoisonnement ? Pourquoi faut-il ensuite « aller jusqu’au moyen âge pour retrouver une nouvelle recrudescence de ce crime » ? On peut hardiment conjecturer que les découvertes d’une Locuste, puis celles des alchimistes répondent à la question. On s’en assurera si l’on se rappelle que l’importation (équivalente à une découverte là où elle a lieu) du sublimé corrosif, du vitriol et de l’arsenie, par la Brinvilliers, la Voisin et leurs émules, en plein midi de Louis XIV, a suffi pour susciter à la cour du grand roi, et de là dans toute la France, une nouvelle poussée de ce crime éminemment contagieux. Au début de notre siècle, les découvertes de la chimie inorganique ont provoqué une recrudes-

  1. Dans le Lyon médical du 24 juin et du 5 juillet dernier, ont paru deux intéressants articles de M. le Dr Henry Contagne, sur La folie devant nos codes.