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notices bibliographiques

la sagesse pratique à la haute moralité consciente. Les idées morales élémentaires seraient : l’idée du bien, ou de la personnalité morale l’idée de l’obligation morale ; l’idée de la liberté intérieure ; l’idée de la sagesse divine. Et ces idées seraient des forces éternelles, séparables de leurs produits concrets qui sont les devoirs familiaux, le droit public, etc. M. Glogau consacre des pages intéressantes à l’étude de ces produits concrets, et il fera de même une revue des produits de l’art dans les chapitres sur l’esthétique, où nous sommes arrivés.

Mais c’est ici encore à la théorie générale qu’il faut regarder, et je l’indiquerai suffisamment par l’énoncé des propositions suivantes : que la vie trouve sa règle extérieure dans le droit, dans l’État, mais qu’elle a aussi sa règle, sa limite en elle-même, devenant alors vertu, science, art, religion ; que les idées esthétiques sont identiques en leur noyau aux idées éthiques, et diffèrent d’elles en ceci qu’elles ne signifient pas des impulsions pratiques, mais plutôt des rapports d’intuitions sensibles ; que l’utile et l’agréable sont des attributs de la vie, mais le bien et le beau les attributs de la morale et de l’art ; que le sentiment esthétique s’affranchit enfin de la vie pratique par une longue évolution qui nous conduit à colorer par l’idée tous nos produits artistiques, à rapporter tous nos idéaux à un idéal fondamental, et à prendre ainsi conscience de cet idéal. L’art conserve dans ce livre la haute fonction que les esthéticiens allemands lui accordent d’ordinaire. La vue de l’art est la plus compréhensive possible ; elle regarde la totalité du monde, et le sentiment esthétique ne peut être mesuré que sur l’éthique du monde.

Quant à la noétique de M. Glogau, elle n’est ni la théorie de la connaissance ni la simple logique. La logique traite des formes abstraites de la pensée ; la théorie de la connaissance traite de l’existence transcendantale de l’esprit et de l’appréciation de ses produits. La noétique se propose un problème pareil à celui de l’éthique et de l’esthétique. Elle dégage des valeurs idéales, par rapport aux valeurs naturelles. Les idées noétiques élémentaires seraient le principe d’identité, le principe d’exclusion, etc. Elles sont des postulats qui marquent de leur empreinte les contenus concrets de l’esprit, et la science est, en définitive, « l’interprétation logique de la vie ».

M. Glogau termine son livre par une revue des sciences concrètes et des disciplines spéciales. La philosophie est pour lui la science de l’ensemble ; elle est science du monde et élévation vers le divin.

Lucien Arréat.

G. Kühner. Kritik des Pessimismus. Pfeffer, Halle a S., 1888, 53 p. in-8o ; 1 m. 20.

Sans doute il faut qu’une chose soit préalablement morte pour qu’on puisse la ressusciter ; mais encore faut-il qu’elle ne soit pas trop morte. J’avoue qu’il ne me serait pas venu à l’esprit qu’une fantaisie