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ANALYSES.j. bergmann. Vorlesungen ueber, etc..

La métaphysique a été définie la science de l’être ; nous pouvons maintenant préciser cette définition, lui donner explicitement un contenu plus concret. La science de l’être est au fond la science de la pensée ou de la conscience. La connaissance de la chose en tant que telle n’est que la connaissance du moi en général. C’est une science a priori, puisqu’elle découle tout entière du concept de l’être ; mais on a tort d’opposer à la connaissance tirée du concept la connaissance tirée de l’objet lui-même. La première ne diffère de la seconde qu’en ce qu’elle considère exclusivement dans l’objet ce qui est représenté dans le concept. D’ailleurs il n’y a pas de concepts indépendants de l’intuition ni, par suite, de concepts vides. On a prétendu quelquefois que l’analyse des concepts ne nous peut donner que des jugements tautologiques. C’est là un préjugé que démentent les faits. Il est facile de comprendre comment la considération des concepts peut conduire à former des jugements hétérologiques. Le fait se produit de deux manières. Nous pouvons former d’un même objet deux concepts distincts et reconnaître ultérieurement leur équivalence. Cette reconnaissance constitue un jugement hétérologique. Parfois aussi un concept contient deux déterminations qui ne peuvent être unies qu’au moyen d’une troisième. Si celle-ci n’y est pas explicitement contenue, un jugement doit intervenir pour compléter le concept.

La métaphysique est la science de la réalité spirituelle. Mais elle n’étudie dans l’esprit que ses caractères les plus généraux, ceux qui se doivent retrouver dans tous les êtres. Elle n’est donc pas la science complète de l’esprit ; mais seulement une partie de cette science. Cette science, qui aspire à connaître le monde spirituel ou réel dans toute la richesse de ses déterminations et dont la métaphysique forme en quelque sorte l’introduction, n’est autre chose que la philosophie.

Nous n’entreprendrons pas de discuter ici les conclusions de l’auteur. L’ouvrage de M. Bergmann mérite mieux qu’une critique superficielle, et une critique approfondie nous conduirait à reprendre pour notre compte les graves et difficiles problèmes de l’être et de la connaissance. M. Bergmann a derrière lui Leibniz et l’on ne saurait juger son livre sans se prononcer en même temps sur la valeur de la Monadologie. Le lecteur nous excusera de reculer devant cette tâche.

Georges Noel.

J. Bergmann. Ueber das Schöne, analytische und historisch-kritische Untersuchungen. Le Beau, recherches analytiques et critico-historiques. Berlin, 1887.

Bien que nous ayons à regretter, dans sa forme d’exposition et dans la manière d’exprimer la pensée, le défaut, pour nous, de cette clarté précise à laquelle nous attachons peut-être trop d’importance, mais que dédaignent aussi beaucoup trop ses compatriotes, nous nous plaisons