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ANALYSES.j. bergmann. Vorlesungen ueber, etc..

implique un développement dans le temps, la réalité de la conscience implique la réalité du temps.

La conscience, en nous révélant à nous-mêmes, nous fait connaître un être véritable, une substance réelle, le moi. Il y a plus, elle nous fait connaître la nature commune de tous les êtres. Cette nature, en effet, doit se trouver en nous, puisque nous sommes des êtres. Tout être a en commun avec nous l’existence, et l’existence doit être en lui ce qu’elle est en nous. Or notre existence à nous est conscience. Notre être ne se distingue pas de la connaissance que nous en prenons. Tous les êtres sont donc des consciences ou des moi. Je ne veux pas dire que tous ont le même degré ou la même espèce de conscience, mais que tous d’une manière plus ou moins distincte se savent ou se sentent exister. Ainsi les êtres véritables sont des esprits plus ou moins analogues à l’âme humaine. La matière n’est qu’une apparence ; le monde réel est le monde spirituel. Néanmoins le monde matériel nous révèle un caractère important de l’être : la solidarité rigoureuse de toutes les réalités. Comme les corps ou êtres apparents, les êtres véritables doivent soutenir entre eux des rapports d’interdépendance. Ils doivent agir et pâtir conformément à des lois et former ainsi un monde unique, cohérent dans toutes ses parties. Il y a plus : ce monde lui-même, unité synthétique de toutes les substances réelles, doit être une réalité, c’est-à-dire une conscience. Par suite tous les moi particuliers, sans cesser d’être des moi, des réalités distinctes, des substances et des causes véritables, sont comme enfermés dans un moi unique et plus vaste, absolue substance de l’Univers. Ces conclusions semblent paradoxales, mais elles découlent logiquement des discussions qui les précèdent et il faut bien les adopter si l’on veut éviter l’idéalisme extrême, croire qu’il y a au monde autre chose que notre propre moi. L’auteur ne se dissimule pas que les résultats obtenus jusqu’ici ne satisfont pas complètement la curiosité métaphysique. Ils résolvent les questions posées, mais soulèvent un monde de questions nouvelles. L’auteur les indique et les formule, mais il les écarte ou les ajourne. Il entend se borner à l’exposition des vérités fondamentales de la métaphysique et croit les avoir démontrées avec une rigueur scientifique.

Néanmoins il ne croit pas sa tâche terminée. Après avoir établi en quelque sorte a posteriori qu’il y a des êtres et que ces êtres sont des moi, il prend l’idée de l’être en elle et se propose d’en développer a priori le contenu. Il retrouve ainsi les conclusions précédentes et en obtient quelques autres assez intéressantes. Nous nous bornerons à résumer rapidement cette seconde partie de l’ouvrage.

L’être est un moment nécessaire de la représentation ; aucune chose ne peut être représentée que comme existante. Mais de ce qu’une chose est représentée comme existante, il ne s’ensuit pas qu’elle existe réellement. On ne peut conclure de la représentation à l’être, que si la représentation est une perception directe et immédiate de l’être. Cela n’a lieu que pour notre moi. L’idée du moi est la seule qui implique la