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ANALYSES.f. darwin. Vie de Ch. Darwin.

En un mot ses livres nous paraissent un peu trop exotériques. Mais ce défaut est, sans doute, voulu, et l’on peut croire que l’auteur a sacrifié de propos délibéré la profondeur à la clarté intuitive. Celle-ci, comme le remarque Kant, n’est nécessaire « qu’au point de vue populaire », mais avons-nous le droit de dédaigner ce point de vue et ne faut-il pas, au contraire, savoir gré à M. Caro de s’y être placé ?

Georges Rodier.

Francis Darwin. La vie et la correspondance de Charles Darwin, avec un chapitre autographique, publiés par son fils. Traduit de l’anglais par Henry C. de Varigny. Tome Ier, avec gravure et autographe. 701 p. in-8o. Paris, C. Reinwald.

Les lecteurs qui aiment à trouver un homme derrière un savant et un philosophe liront avec intérêt le volume que vient de publier M. Fr. Darwin. L’auteur de l’Origine des espèces restera une des grandes personnalités de notre siècle ; c’était un service à rendre à ses admirateurs, aux psychologues, aux curieux, que de leur faire connaître dans son intimité ce révolutionnaire de la science, de leur montrer comment ses œuvres étaient nées, comment elles avaient grandi, comment elles avaient fini par arriver à leur état définitif et à faire leur entrée dans le monde. Le premier volume, qui seul a paru jusqu’à présent dans la traduction française, comprend une notice sur la famille Darwin, une autobiographie assez courte, mais très intéressante, écrite par Charles Darwin lui-même, des « réminiscences de la vie de tous les jours de mon père », par M. Francis Darwin, et enfin des lettres de Darwin qui nous conduisent jusqu’à l’apparition de l’Origine des espèces, en 1859. Ces lettres sont accompagnées d’un récit explicatif de M. Fr. Darwin.

Darwin naquit à Shrewsbury, le 12 février 1809. Son enfance ne paraît rien avoir eu d’absolument remarquable. On put remarquer cependant en lui de très bonne heure un grand intérêt pour les plantes, les animaux et les collections. Au printemps de 1817, il fut envoyé comme externe à une école de Shrewsbury, où il resta un an. « J’ai entendu dire, raconte-t-il, que j’apprenais beaucoup plus lentement que ma plus jeune sœur Catherine, et je crois qu’à divers points de vue j’étais un méchant garçon. À l’époque où j’allais à cette école, mon goût pour l’histoire naturelle, et plus spécialement pour les collections, était bien développé. J’essayais d’apprendre le nom des plantes et je collectionnais toutes sortes de choses, coquilles, sceaux, franchises postales, médailles, minéraux.

« L’amour de la collection qui amène un homme à être un naturaliste systématique, un virtuose ou un avare, était très ancré en moi et était incontestablement inné, aucun de mes frères ou sœurs n’ayant jamais possédé ce goût » (p. 32-33). Une note de M. Fr. Darwin confirme, d’après le témoignage d’un ancien condisciple de son père, le goût de ce dernier pour l’histoire naturelle.