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nombre limité, presque toujours frères ou parents, et à qui elle ne peut être infidèle sans autorisation. »

Dans le chapitre VI, l’auteur s’occupe du mariage par capture, qui n’est pas, dit-il, « une forme de mariage, mais une manière de se procurer une ou plusieurs femmes ». Si quelques auteurs ont exagéré, selon M. Letourneau, en faisant du mariage par capture un état universel et nécessaire, il est incontestable que le rapt des femmes a été largement pratiqué par toute la terre, que très souvent il a été considéré comme glorieux et que, dans bien des pays, il s’est atténué en mariage pacifique.

Dans le cérémonial du mariage figurent souvent des pratiques rappelant ou simulant par survivance le rapt primitif de la femme ; ce rapt symbolique « représente surtout une survivance mentale, la tradition d’une époque plus ou moins lointaine où la violence était tenue en haute estime et où il était glorieux de se procurer à main armée des esclaves à tout faire. Dans les pays où existe le cérémonial de la capture, le beau temps du rapt est d’ordinaire quelque peu passé, mais l’esprit en est toujours hanté et, même en se mariant pacifiquement, après contrat ou marché débattus, on aime à symboliser dans le cérémonial du mariage les enlèvements d’antan, qu’on ne peut plus ou qu’on n’ose plus commettre. Ces pratiques ont aussi une autre portée : elles signifient que la nouvelle épousée, alors presque toujours achetée aux parents, doit être entièrement subordonnée au maître qu’on lui a donné et occuper dans la maison conjugale une place des plus humbles. » Et l’auteur ajoute plus loin : « Généralement, en effet, le cérémonial de la capture coïncide avec une très grande sujétion de la femme, là même où il n’est plus qu’une survivance fort lointaine. À Sparte, par exemple, la femme pouvait être prêtée par le mari, et il en était de même dans la Rome antique où elle était, suivant l’expression légale, in manu, assimilée aux esclaves, et où le pater familias avait sur elle droit de vie ou de mort.

« On est donc fondé à croire que, dans les pays civilisés, où, aujourd’hui encore, la législation conjugale procède du droit romain, la position subordonnée qui est faite à la femme est le dernier vestige primitif du mariage par capture, du rapt atténué en marché, tel que le pratiquait la Rome des premiers âges. » Le chapitre VII traite du mariage par achat, qui a une signification très nette et fort importante au point de vue moral et social. Il implique un profond dédain de la femme, son assimilation aux objets mobiliers, au bétail, aux choses en général.

Dans les chapitres VIII et IX, l’auteur s’occupe de la polygamie, dans le chapitre X de la prostitution et du concubinage, dans les chapitres XI et XII de la monogamie, dans le chapitre XIII de l’adultère, dans le chapitre XIV de la répudiation et du divorce, dans le chapitre XV du veuvage et du lévirat. Nous ne pouvons suivre l’auteur dans ses diverses considérations et dans ses expositions détaillées, bornons-nous à indi-