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ANALYSES.l. liard. Définitions géométriques, etc.

immédiatement les principes dès qu’on en comprend les termes, on ne les sait ni on les croit ; on sait les propositions nécessairement démontrées à l’aide des principes ; on croit enfin sur le témoignage d’autrui. Nous ne croyons pas à notre pensée, nous la pensons et le doute ne peut s’introduire dans cette pensée de la pensée.

L’ordre de la pensée correspondant à l’ordre du monde, nous pouvons donc accorder toute confiance aux classifications et aux définitions qui en sont la suite, pourvu que ces classifications et ces définitions soient légalement formées. La définition empirique doit suivre et reproduire l’ordre même de la nature. L’esprit donne a priori la forme de la définition, mais c’est l’expérience qui en fournit la matière. Or, s’il est facile d’établir des règles théoriques et idéales de la classification et de la définition, rien n’est moins facile que de remplir ces cadres idéaux d’une manière satisfaisante. Aussi les naturalistes sont-ils loin d’être d’accord sur les classifications et par suite sur l’ordre à suivre dans les définitions, pour l’énonciation des caractères. C’est pour cela que la définition empirique n’est jamais que temporaire et provisoire. Elle est le résumé des résultats acquis par la science jusqu’au jour où elle est posée, elle ne peut servir de principe à l’acquisition des nouvelles connaissances. Par conséquent la définition empirique n’entre dans aucune démonstration. Dès qu’elle est construite, son rôle est achevé. M. Liard n’a donc pas eu à écrire un dernier chapitre sur le rôle des définitions dans la démonstration en histoire naturelle, pour faire pendant à celui que nous avons analysé plus haut sur le rôle des définitions dans la démonstration géométrique.

En résumé donc et pour conclure, la définition géométrique est une définition par génération, une définition formelle, a priori, qui mérite le nom de synthétique ; elle est immuable et engendre la connaissance ; au contraire, la définition empirique est une définition par composition, une définition matérielle, a posteriori, qu’on doit appeler analytique ; elle est temporaire et provisoire, et ne fait que résumer les connaissances acquises.

Nous n’avons pas voulu interrompre l’analyse du très intéressant travail de M. Liard par de trop longues réflexions, estimant qu’avant de discuter l’œuvre d’un auteur il faut la faire connaître au lecteur aussi exactement, aussi objectivement que possible et que le meilleur moyen pour arriver à ce but est de tâcher d’exposer de suite la trame de ses pensées. Et cela est surtout nécessaire avec un auteur tel que M. Liard, dont les idées se suivent dans un ordre parfait et s’enchaînent solidement les unes aux autres. Nous croyons devoir cependant présenter quelques observations. Elles porteront d’abord sur le rôle des axiomes dans les démonstrations, puis sur l’exclusion des notions d’espèce et de genre dans la définition géométrique.

Pour ce qui est du rôle des axiomes, on a vu que M. Liard n’admet pas qu’ils jouent aucun rôle dans la démonstration. M. Renouvier d’abord (Logique, 2 édit., t.  II, p. 178), puis M. Rabier (Logique,