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PAULHAN.finalité des éléments psychiques

dans le bec du calamus scriptorius ; ce centre ne paraît pas fonctionner par voie réflexe, bien qu’il soit influencé par les fonctions réflexes, il agit automatiquement selon la nature du sang qui l’irrigue, selon que ce sang est plus ou moins riche en oxygène ou chargé d’acide carbonique ; or, « on peut, dit M. Richet, supprimer l’encéphale, couper la moelle au-dessus du bulbe, sectionner les deux pneumo-gastriques, autrement dit supprimer toutes les voies centripètes sans empêcher le système respiratoire incitateur d’avoir lieu. »

Lorsque, dans une société, une association se dissout, c’est une loi de finalité qui se rompt, et les éléments, les hommes qui composaient l’association, sont rendus à la vie individuelle, ils entrent alors dans de nouvelles formes d’activité sociale. Si, par exemple, une filature se ferme, les ouvriers et les ouvrières qui y travaillaient et qui étaient réunis par une association systématique se remettent à travailler chacun de son côté, soit séparément, soit dans de nouvelles associations où quelques-uns peuvent d’ailleurs se retrouver. Il en est de même des éléments psychiques ; quand pour une cause ou pour une autre le lien qui les rattachait vient à se rompre, ils entrent dans de nouvelles associations où ils travaillent chacun pour soi, au risque de ne produire que de l’incohérence. Cette activité isolée des éléments, nous la retrouvons d’une manière frappante dans les maladies mentales.

Le calembour est une forme de ce désordre ; en l’analysant on voit qu’il consiste essentiellement en ce qu’un son employé comme élément dans un complexus particulier (son, idées et images systématisés constituant la signification du son) qui fait lui-même partie d’un système plus complexe, la phrase, se sépare au moins partiellement de ces deux systèmes et s’associe à d’autres systèmes d’idées et d’images. L’association par ressemblance de certaines parties des mots, l’association par la rime par exemple, est un fait essentiellement analogue, ici c’est un son qui, associé systématiquement à d’autres sons, s’allie en même temps à des sons différents pour former simultanément ou avec des intermittences rapides des systèmes qui ne s’harmonisent pas entre eux ; dans cette dernière classe on peut ranger la plupart des lapsus linguæ et des lapsus calami.

Les exemples abondent. M. Regnard a cité plusieurs pièces de vers écrites par des fous, où se trouve à un haut degré le mode d’association systématique élémentaire ; quelquefois on voit un reste de coordination intellectuelle comme dans la pièce suivante, où cependant l’incohérence aussi se manifeste.

« J’aime le feu de la fougère
Ne durant pas, mais pétillant ;