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par des espaces insensibles. Les expériences concernant la pression sont moins sûres que celles qui concernent le chaud et le froid, parce qu’il est plus difficile d’empêcher une pression de se faire sentir aux points voisins de celui qu’on veut étudier. Le sens de la chaleur est partout, intensivement et extensivement, moins développé que le sens du froid, et tous deux le seraient moins que le sens de la pression. Cette dernière s’exercerait en tous les points de la peau, mais spécialement en des points particuliers ou points de pression (Druck-punkte). Au sujet de la douleur dont il se contentait précédemment de dire qu’elle est un phénomène central, W. remarque avec plus de précision aujourd’hui qu’elle semble se présenter en tout point de la peau, et provient vraisemblablement de l’irritation non de terminaisons nerveuses spéciales, mais des fibres sensibles elles-mêmes ; cette dernière circonstance en expliquait l’homogénéité (395, cf. 409, 114).

W. critique, à propos des sensations musculaires, la théorie de W. James sur la volonté. James admet que primitivement des excitations volontaires centrifuges se seraient associées aux sensations musculaires provoquées par l’innervation volontaire et qu’ensuite l’empire de la volonté sur les groupes particuliers de muscles résulte du réveil de ces sensations, devenues familières à la conscience par l’association. « La puissance des associations habituelles, objecte W., est sans doute un fait bien connu. Mais l’association n’unit jamais que plusieurs sensations ; on ne saurait concevoir comment une excitation volontaire dépourvue entièrement de sensation peut s’associer avec une sensation musculaire, parce qu’on ne peut comprendre comment un acte psychique dépourvu de sensation peut exister comme fait de conscience. Mais il est absolument impossible de concevoir comment en outre dans les impulsions volontaires diverses il peut se trouver une grande diversité de ces actes dénués de sensation et qui pourtant doivent pouvoir être tous distingués par nous. S’ils ne l’étaient pas, comment leur serait-il possible d’éveiller une contraction musculaire déterminée avec la sensation musculaire qui s’y rattache ? » W. conclut donc, très justement, croyons-nous, que le Fiat de James est une abstraction, qu’il doit être considéré comme inséparablement fondu avec la sensation de mouvement. Il se distingue donc de James en ce sens qu’il refuse d’admettre que les impulsions volontaires puissent exister sans des sensations déterminées, c’est-à-dire soit sans des sensations musculaires proprement dites, soit sans des souvenirs musculaires (405 et suiv.).

Des expériences ont été faites et sont résumées par W. pour la détermination du seuil d’excitation qualitatif des sensations sonores. 16 vibrations permettent toujours de reconnaître la hauteur du son ; mais un bien moins grand nombre, deux seulement dans des circonstances favorables, suffisent non seulement pour donner à l’impression le caractère de hauteur, mais encore pour faire distinguer le son d’un son plus haut ou plus bas que lui de l’intervalle 24 : 25 (424). — La sensibilité