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M. Lotze ne connaît pas les thèses de la Critique philosophique sur l’infini, le phénomène et la chose en soi. Je ne songe pas à m’en étonner, encore moins à m’en plaindre ; de mon côté, je n’ai lu de ses ouvrages que les parties traduites par M. Penjon (plusieurs desquelles n’ont pas encore été publiées). J’ai cru qu’il me serait permis de considérer séparément les propositions de son dernier livre touchant l’infini du temps et de l’espace. Ces propositions m’avaient été signalées, par un correspondant très expert en ces choses, comme les plus fortes, suivant lui, qui pussent être soutenues contre ma propre manière de voir et à l’appui de l’existence réelle d’un infini actuel de quantité dans le monde. C’est ainsi que j’ai désiré d’en joindre l’examen à la critique de diverses doctrines sur le même sujet, que j’avais précisément passées en revue sous la rubrique des Labyrinthes de la métaphysique, et toujours en vue d’élucider ma propre solution d’une question si éminemment troublante. Qu’on veuille bien excuser ces explications personnelles.

Maintenant, me suis-je beaucoup trompé dans ce que j’ai cru comprendre des idées de M. Lotze d’après la traduction de M. Penjon (que j’ai fidèlement citée en entiers alinéas) ? Oui, apparemment, sur le point où M. Lotze demande que la traduction soit modifiée pour mettre sa pensée d’accord avec la partie non traduite de son ouvrage. Mais au fond, et quant à l’essentiel, la même question subsiste, et la discussion n’en sera point changée, pour être débarrassée de certaines considérations accessoires. M. Penjon remarque, et je suis entièrement de son avis, qu’en faisant droit à la réclamation de M. Lotze on ne rend que plus profond encore un dissentiment entre nous auquel tout aboutit de manière ou d’autre. Il ne nous importe plus tant de discuter le problème de la nature du temps ou de l’espace, la thèse de Kant à conserver ou à rectifier sur ce chapitre, les rapports de la faculté intuitive avec les données empiriques de la sensibilité. La rectification de M. Lotze éclaircit et simplifie tout. Il ne s’agit plus en effet de ces parties indéfinies qu’on envisage dans l’étendue ou dans la durée, et dont on peut comprendre différemment l’accumulation suivant que l’on définit l’étendue ou la durée mêmes. Il s’agit des réalités, quelles qu’elles soient, des choses quelconques. « Je n’ai pas dit, ainsi s’exprime M. Lotze, que le monde des réalités est fini, et je n’ai pas approuvé cet argument, à savoir qu’une suite illimitée de choses quelconques ne peut former un ensemble simultanément existant. » Ainsi la seule question que j’avais entendu discuter nous reste : celle de la possibilité d’une synthèse interminable terminée. Je retire formellement les objections que j’ai faites à M. Lotze, en tant que j’ai cru à tort qu’il admettait