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DES NOTIONS
D’ESPÈCE ET DE GENRE
DANS LES SCIENCES DE LA NATURE




I


Toutes nos connaissances se distribuent en espèces et en genres. La raison formelle de cette loi est aisée à découvrir : toutes nos connaissances doivent avoir un élément commun, et chacune d’elles doit avoir un élément propre ; s’il n’en était pas ainsi, ou bien elles seraient absolument séparées l’une de l’autre, ou bien elles seraient fondues ensemble ; dans les deux cas, la pensée serait impossible. Un genre est l’élément commun à plusieurs connaissances ; une espèce est la somme de cet élément commun et de l’élément propre à chacune d’elles. Ainsi entendus, tous les genres et toutes les espèces se ressemblent ; mais lorsqu’au lieu de considérer la forme on considère le contenu des idées, on est amené par l’expérience à distinguer des espèces et des genres dans le système universel des espèces et des genres purement logiques. Alors se présentent des questions qui intéressent les sciences, et en particulier celles où la détermination concrète des espèces et des genres est presque l’unique objet de la recherche, et que la logique pure est impuissante à résoudre. De ces questions, la plus importante est, sans contredit, celle de la nature des espèces et des genres.

On a dit souvent : les espèces et les genres sont des abstractions créées par le langage ; il n’existe hors de nous que des individus, et nos seules connaissances réelles sont les représentations individuelles ; mais incapables d’avoir une image distincte de chaque objet singulier, nous désignons par un même terme tous ceux qui se ressemblent. Ainsi, chaque terme commun divise les choses en deux classes, celles qui possèdent l’attribut désigné et celles qui ne le possèdent pas. La classe n’a donc qu’une réalité d’emprunt ; si le mot qui en est le signe disparaissait, les propriétés abstraites dont