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En résumé, selon Kant, il est impossible de démontrer que Dieu est, mais il ne l’est pas moins de démontrer qu’il n’est pas : c’est ce que M. Béraud a tenté de faire.


L’ordre extérieur de la 2e et de la 3e partie, si l’on s’en tient aux grandes divisions, est simple et net. L’auteur considère d’abord Dieu dans sa substance et montre qu’il n’est pas absolu, mais qu’il dépend du temps, de l’espace et des vérités éternelles. Puis il passe à ses attributs, dont il met en relief les incohérences et les contradictions : le tableau, quoique long et dénué de vues un peu hautes, intéresse par sa vivacité. La doctrine de la Création et celle de la Providence sont attaquées ensuite au nom des lois de la physique ; la dernière est mise en contradiction avec le dogme de la perfection divine et avec le fait de l’existence du mal.

M. Béraud ne cherche pas à rajeunir ces vieilles discussions. Au lieu de l’y suivre, nous citerons cette page, qui résume sa pensée : « Notre conclusion désormais ne saurait être douteuse ; Dieu n’est qu’une création de l’esprit humain, une conception transcendante réalisée. Mais faut-il dire pour cela que Dieu n’existe pas ? Si Dieu n’est point un être réel, devons-nous dire qu’il n’y a point de Dieu ? Ce serait méconnaître la nature humaine. Quelle est cette force supérieure qui nous dirige dans notre conduite ? Quel est cet instinct sublime qui nous montre où est notre devoir et qui nous fait tressaillir d’admiration en présence des actes d’héroïsme, de dévouement, de charité ? Quel est cet idéal de la beauté, que je n’aperçois que confusément, mais qui dirige la main de l’artiste dans ses créations ? Homme, ne cherche plus ton Dieu en dehors du monde : ce Dieu est en toi : il n’y a pas d’autre ciel que celui de ta pensée. »

J. L.

Dr Fritz Schultze : Über Bedeutung und Aufgabe einer philosophie der naturwissenschaft. Iéna, 1877. Broché, in-4o, 27 pages.

Dans ce travail, qui est une leçon professée à l’École polytechnique de Dresde, l’auteur cherche, comme le titre l’indique, à définir l’objet et la mission d’une philosophie de la nature.

D’après lui, la théorie de la connaissance doit être essentiellement historique : elle doit puiser dans les différents degrés de la hiérarchie des sciences la connaissance du développement de la causalité : « par ce moyen, dit-il, elle apprend à dompter le dogmatisme… et, grâce à l’introduction d’un véritable empirisme critique dans toutes les sphères, elle donne aux sciences naturelles une appréciation plus juste du sens philosophique et à la philosophie le sentiment plus précis de l’empirisme scientifique. »