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pas tel, mais qu’il se détruise lui-même, qu’en tant qu’il existe comme le beau négatif, sa contradiction se résolve et que son accord avec lui se rétablisse. Le beau, dans ce processus, apparaît comme la puissance qui soumet à sa domination la révolte du laid. Dans cette conciliation naît une sérénité infinie qui excite en nous le rire. Le laid s’affranchit dans ce mouvement de sa nature hybride, propre, isolée. Il comprend son impuissance et devient le comique. Tout comique comprend en soi un moment qui s’oppose au pur idéal. Mais cette négation est refoulée, réduite à n’être qu’une simple apparence, elle se résout dans un rien ; l’idéal positif est reconnu dans le comique. La manifestation négative elle-même se dissipe. » (Ibid.)

Telle est en effet la théorie hégélienne du comique. L’auteur n’aurait-il pas pu la rendre plus claire, la dépouiller un peu de ce langage qui s’adresse aux initiés ? Craindrait-il que, livrée aux profanes, elle ne perdît de sa profondeur et de sa vérité, ou bien encore qu’elle ne fût sujette à quelques objections ? À. nos yeux, il est regrettable qu’un livre débute ainsi. Qu’il s’agisse du laid comme du beau, quand on reprend une thèse que l’on dit n’avoir pas été suffisamment ni complètement traitée, il faudrait la traiter soi-même avec plus d’ampleur, de clarté, et la développer sans répéter servilement les formules sacramentelles de l’école. — Mais poursuivons. « Si le beau est ainsi l’entrée dans le domaine du laid, le comique sera la sortie. » — Cela est trop évident. Seulement, selon d’autres esthéticiens de la même école (Weisse, Schasler), le laid serait plutôt le vestibule du beau véritable (du beau idéal). « Le beau, ajoute notre auteur, exclut de lui-même le laid ; le comique fraternise avec lui, mais il lui enlève ce qu’il a de repoussant, parce que en opposition avec le beau il fait apparaître son caractère relatif et sa nullité. » (Ibid., p. 9.) Cette théorie peut être vraie exposée ailleurs (V. Ruge). Nous reconnaissons du moins ce qu’elle a d’original ; mais encore une fois, sur de telles questions n’eût-il pas fallu être plus clair et plus explicite ? N’eût-il pas été bien d’établir une discussion qui fait ici absolument défaut ? Quant à la méthode, elle est, dit-on, toute tracée par ce qui précède. La marche à suivre dans l’esthétique du laid sera celle-ci : 1° Commencer par l’idée du beau, sans la développer « en dire ce qu’il faut pour faire comprendre le laid qui est sa négation » ; 2° cette recherche doit finir par le comique. Très-bien ; mais encore faut-il remplir ce cadre. Pourquoi passer si légèrement sur le premier terme ? De l’idée du beau il n’est rien dit ou presque rien. L’auteur se hâte d’arriver au second ; quant au troisième terme (le comique), la caricature qui est à la sortie en fait