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analyses.mamiani. Compendio e sintesi.

de l’expérience et les axiomes de la raison, nous nous trouvons en face de l’ancienne ontologie, qui prend son point de départ dans l’idée de l’Être et en déduit les principes de la connaissance avec ceux de la réalité.

L’idée de l’Être ou l’axiome d’identité est pour M. Mamiani, comme pour tous les anciens métaphysiciens, la notion première d’où dérive toute science. Elle est antérieure à l’idée de cause, puisque la causalité ne peut être attribuée qu’à ce qui est ; antérieure à l’idée de substance, puisque le principe de contradiction seul s’oppose à ce que la substance ne soit pas conçue in se et soit attribuée à quelque autre sujet comme l’une de ses modifications. « Nous trouvons avec Aristote le premier connaissable dans l’Être et dans l’axiome qui l’exprime. » Cet axiome ne peut se justifier autrement que par lui-même et par l’évidence qu’il porte avec lui toute tentative pour le révoquer en doute devant commencer par une affirmation, et l’affirmation, comme la pensée, n’étant possible que par lui.

Maintenant l’être ainsi connu ne peut être qu’absolu. Il est affirmé sans conditions ; c’est lui au contraire qui conditionne toute existence particulière : son indépendance résulte de son universalité et de son antériorité. De plus, il est réel, car s’il ne l’était pas, rien ne le serait, et toutes nos affirmations touchant quelque existence que ce soit participeraient au caractère vide et formel de l’affirmation fondamentale. Il est nécessaire enfin, ce qui est évident, l’être ne pouvant pas ne pas être ce qu’il est et ne pouvant pas, d’autre part, ne pas être conçu comme il est. Il est la clef de voûte de tout le système de nos pensées comme du système de l’univers ; à lui sont suspendues, en lui résident éternellement toutes les vérités nécessaires sur lesquelles repose à son tour le monde. Ces vérités ne sont pas discontinues par rapport à lui, elles participent de sa nature et sont absolues comme lui : il est même inutile de prétendre qu’elles résident en une intelligence, car c’est aller contre leur définition d’après laquelle elles sont « l’absolue réalité se manifestant en modes déterminés et spéciaux par l’intermédiaire des idées. » C’est une erreur d’en faire de pures entités mentales ; elles existent en soi et par soi ; indépendantes de l’esprit à qui elles se trouvent liées, elles constituent « la réalité perpétuelle et indéfectible en relation avec les intelligences. » L’auteur en fait presque autant de dieux. Reprenant alors le mot d’expérience dans le sens où il est usité dans toutes les écoles spiritualistes, il déclare qu’elles n’ont rien de commun avec l’expérience et proviennent d’une toute autre origine que de l’induction. Notre esprit lui-même, s’il a la faculté de les concevoir n’a pas celle de les créer.

Mais laissant là les idées, M. Mamiani revient au principe premier ; il insiste encore sur son caractère primordial et indémontrable : il s’applique surtout à établir que l’Être ne doit être confondu ni avec le devenir, ni avec la possibilité abstraite. Le réel étant défini « l’acte, et non la puissance, ce qui existe en soi, non en autrui, l’objet de l’idée, et non l’idée, l’objet de la représentation, et non la représentation,