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a. binet. — perception des longueurs et des nombres

pourrait servir d’indice à l’enfant. Si l’enfant désigne correctement les trois fois la ligne la plus longue, il est probable qu’il peut apprécier avec la vue la différence de longueur qu’on lui soumet. On peut, du reste, pour exclure tout hasard dans les réponses, recommencer l’épreuve en renversant le tableau selon ses bords. Il est, en outre, à remarquer que la longueur absolue des lignes que l’on compare peut exercer une certaine influence sur la perception de leur différence, et il y a sans doute certaines longueurs qui sont plus favorables que d’autres à cette estimation. Il faut donc ajouter à notre tableau une série de lignes présentant toujours entre elles ce même rapport de 28/40, mais avec des longueurs absolues différentes. Enfin, dernière observation, je me suis toujours arrangé pour que la différence absolue de deux lignes ne fût pas inférieure à 1 millimètre. J’ai dressé cinq tableaux d’après cette méthode ; ces cinq tableaux contiennent des longueurs présentant des rapports égaux à 28/40, 32/40, 34/40, 36/40, 38/40 constituent par conséquent une échelle permettant de mesurer l’estimation des longueurs.

Je ne publie pas ici ces tableaux, c’est inutile ; chacun peut en construire de semblables, s’il en a besoin.

Ce sont ces tableaux qui m’ont servi dans mes études de psychologie infantile. Mais avant d’en faire l’emploi, je les ai soumis à l’examen des personnes adultes qui sont généralement parvenues sans erreur à reconnaître les lignes les plus longues. Je dois cependant signaler que pour le dernier tableau présentant des rapports égaux à 38/40, deux adultes ont commis plusieurs erreurs : l’un d’eux s’est même trompé dans le tableau où les lignes sont dans le rapport de 36/40[1].

Examinons maintenant comment se comportent les enfants devant les tableaux. Il faut d’abord prendre avec eux quelques précautions destinées à retenir leur attention toujours fugitive. Ainsi, le premier soin doit être de ne montrer à la fois que les deux lignes à comparer, en cachant les autres avec un écran mobile ; car si on montre à l’enfant le tableau entier, il est assez difficile d’empêcher son regard d’errer sur toutes les lignes ; de plus, il est très utile de ne

  1. D’après Weber, la plus petite différence que l’on puisse saisir entre deux lignes, équivaut à 1/50 environ de la plus courte ; mais ce nombre varie avec les individus et avec l’exercice.