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ANALYSES. — l. cohn. Philonis libellus, etc.

et de l’objet de la philosophie qui puise sa source dans la contemplation de la nature et des cieux et a pour but le Bien ; fin du savoir encyclique ; le second, de la physique philonienne qui admet à la fois et sans contradiction l’éternité et la création du monde ; le troisième, des théories anthropologiques de Philon qui fonde le spiritualisme, étranger même à Platon, mais admet la relativité de la connaissance. L’existence et la nature de Dieu, les puissances divines, le Logos, les problèmes supérieurs de la morale (chap. IV, V, VI, VII, sont étudiés dans le second volume, d’après les textes de Philon critiqués souvent avec bonheur. Malgré certaines longueurs, M. D. a su, notamment dans la très délicate question des puissances et du Logos, de leurs rapports entre eux et avec Dieu, de leurs attributs et de leur nature adopter une solution très nette, très logique, très forte, et qui paraîtra en grande partie nouvelle.

Nous devons ici nous contenter de cette analyse toute sommaire : on voit que, malgré son étendue et à cause même de cette étendue, l’ouvrage de M. D. contient bien des lacunes. Le livre premier est insuffisant, le dernier chapitre du second est seul approfondi. En ce qui concerne Philon, dont la biographie est à peine indiquée, l’auteur ne se préoccupe nulle part du classement chronologique et méthodique de ses œuvres et consacre une trentaine de pages à l’exposition de l’éthique philonienne. Il n’ignore pas pourtant que la morale est à la fois pour Philon la cause efficiente et finale de toute philosophie, que c’est le point principal, unique, pour ainsi dire, le centre de tout le système, et il n’en dit rien ou presque rien. Par contre, il est impossible de contester après avoir lu l’ouvrage de M. D. le titre de métaphysicien et de métaphysicien de premier ordre au célèbre penseur alexandrin qui va donner beaucoup plus que Platon et avant Plotin à la scholastique et au spiritualisme moderne les éléments essentiels de leur cosmologie, de leur psychologie, de leur théologie rationnelle. La métaphysique de Philon, trop méconnue même en Allemagne, est enfin placée avec preuves à l’appui au rang qu’elle doit occuper dans l’histoire de la philosophie, dont l’œuvre de M. D. élucide un point nouveau : elle constitue ainsi, en dépit des lacunes parfois considérables et des hypothèses douteuses qu’on pourrait y relever, un travail historique original et d’une réelle valeur.

Eugène Blum.

L. Cohn. Philonis Alexandrini libellus de opificio mundi, specimen novæ editionis operum Philonis. Breslau, 1889, LVIII-108 p. 

Ce travail, couronné par l’Académie de Berlin, est un spécimen de la nouvelle édition des œuvres de Philon entreprise par M. C. sur les conseils de son maître G. Studemund. L’introduction contient une courte étude des éditions antérieures et de tous les manuscrits connus : dans une seconde partie consacrée à la langue de Philon, l’auteur prouve, par