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fr. paulhan. — le nouveau mysticisme

est une erreur puérile ou dangereuse, car l’esprit du mal est peut-être mêlé à ses pratiques ; pour les libres penseurs qui restent incrédules, il est ridicule. J’avoue qu’il me paraît à peu près aussi respectable et aussi vrai que d’autres croyances religieuses, à peine plus dangereux que beaucoup d’entre elles, moins dangereux que quelques-unes peut-être pour la santé du système nerveux. Il sert comme elles à donner un appui à ceux qui le désirent, il offre une doctrine assez simple au fond dans ses traits généraux, à ceux que leurs anciennes croyances ont abandonnés, et il établit entre le monde et l’homme une harmonie, factice et trompeuse à mon avis, mais qui satisfait et console ceux qui ont la foi. Si je ne puis penser, comme le ferait presque une certaine école, qu’il est provisoirement et localement vrai, rien ne m’empêche d’admettre qu’il soit provisoirement et localement utile, qu’il remplisse dans ces conditions un office élevé, et par suite qu’il ait, au moins provisoirement, droit à quelque respect de notre part.

À côté du spiritisme, les sciences occultes, la magie, l’astrologie, les doctrines des anciens sages de la Chaldée, de l’Égypte et de la Perse, offrent une sorte de renouveau. La théosophie, les doctrines hindoues reprennent faveur et viennent conquérir l’Occident. Des sociétés se forment, des publications se fondent, meurent et renaissent pour propager la science, pour multiplier ou susciter les adeptes et les initiés. Ici encore se montre bien le double aspect théorique et pratique de la recherche de l’harmonie dans les aspirations nouvelles. M. Héricourt signalait récemment, à propos des recherches de M. Charles Henry, sous le fatras des sciences occultes, la vision de l’importance des nombres et de leurs rapports pour l’explication du monde. En efîet, ramener le monde à des lois générales est un des buts des sciences occultes, mais ce n’est pas le seul. Une fois connues les causes des phénomènes, il faut se servir de ces découvertes pour agir sur le monde. La magie n’est pas autre chose que la science qui permet la mise en activité par l’initié de l’agent universel et des différentes forces invisibles, émanées de l’âme humaine, pour obtenir certains résultats pratiques. Notons encore que l’établissement d’une fraternité universelle est un des buts de la société théosophique. Sur plusieurs points la théosophie et le spiritisme se rencontrent, mais c’est souvent pour se combattre. Si les spirites ont attaqué les théosophes, ceux-ci ne voient guère dans le spiritisme qu’une forme incomplète et inférieure des connaissances occultes : l’initié est bien supérieur au médium ; le médium subit la force, l’initié la dirige ; le médium est passif, l’initié est actif ; l’un et l’autre, chacun à sa manière, cherchant à augmenter notre