Page:Revue philosophique de la France et de l'étranger, XXX.djvu/507

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
493
fr. paulhan. — le nouveau mysticisme

lement philosophique mais pratique et morale, nous le constaterons souvent, il se manifeste à présent en réaction contre l’individualisme et la dispersion des intérêts et des croyances qui dominaient jusqu’à présent. Sans doute il est tout naturel que l’hypnotisme dans ses formes les plus connues ait été appliqué à la guérison des malades, la solidarité humaine a malgré tout été toujours suffisante pour produire de pareils faits ; mais on a témoigné déjà plus de hardiesse et beaucoup de confiance dans la nouvelle science, en s’en servant pour la correction des enfants vicieux. De plus, autour de l’hypnotisme, d’autres catégories de faits plus ou moins étroitement reliées à lui commencent à se dessiner et ce sont elles surtout qui alimentent notre besoin de merveilleux : la vision à distance, la suggestion mentale, les hallucinations véridiques, les songes prophétiques, etc. Tous ces phénomènes, dont un certain nombre paraissent sinon prouvés au moins rendus probables par les dernières recherches faites en France et en Angleterre, semblent devoir, dans l’esprit des personnes qui s’en occupent, ou du moins de plusieurs d’entre elles, établir des communications harmoniques entre les hommes séparés par la distance, entre les hommes et le monde extérieur, et même entre le monde des vivants et le monde improbable ou problématique des morts.

Si nous nous avançons un peu plus dans le domaine encore inconnu que la science entrevoit, nous trouvons le spiritisme, dont la prétention avouée est de nous mettre en rapport avec les esprits des morts. J’en dirai quelques mots ici. On n’en parle plus guère, ou on n’en parle guère encore dans le monde scientifique ; mais à le prendre seulement par son côté psychologique et social, il offre plus d’intérêt et peut avoir plus d’importance qu’on ne paraît disposé à le croire. Déjà d’ailleurs des savants connus ont commencé à s’en occuper, il me suffira de citer ici le nom de M. Ch. Richet et de rappeler ses travaux sur les mouvements inconscients et la suggestion mentale. Aux causes invoquées par M. Chevreul, M. Richet a été déjà conduit à ajouter au moins comme probable l’influence de la suggestion mentale. Peut-être faudra-t-il aller plus loin, certains phénomènes spirites, comme une partie de ceux qu’a exposés M. Crookes, sembleraient impliquer une action de l’esprit, ou si l’on préfère du système nerveux qui s’exercerait sur la matière dans des conditions bien différentes de notre activité ordinaire. Les spirites vont plus loin encore : mais rien ne nous oblige à les suivre[1]. Quoi qu’il en soit, il

  1. L’hypothèse de la réalité des esprits est une des plus invraisemblables qu’on ait données pour expliquer les phénomènes spirites. Pour certaines caté-