Page:Revue philosophique de la France et de l'étranger, XXX.djvu/442

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
432
revue philosophique

cule. On a donc bien raison de sentir et d’affirmer hautement, dans certaines écoles, que la valeur morale des choses s’impose à l’individu au nom de raisons qui dépassent l’individu. Mais on aurait tort d’en conclure qu’on puisse en chercher le fondement dans quelque chose de supérieur et d’clranger à la totalité des individus ou, pour mieux dire, au système de leur société. Ce serait commettre le paralogisme appelé par les logiciens passage du sens divisé au sens composé.

G. Belot.

Anton Œzelt-Newin. Ueber Phantasie Voustellungen (Les représentations de l’imagination), in-8o. Leuschner et Lubensky, Gratz. 130 p.

Voici un livre excellent de psychologie positive. Beaucoup de faits, peu de déductions. L’auteur non seulement ne s’est pas fait faute d’observer par ses propres yeux, mais il a interrogé les mémoires des grands artistes, il s’est renseigné de toutes manières sur leurs procédés de création ; et puis, il connaît tout ce qui s’est écrit sur son sujet ou sur les sujets voisins, non seulement en Allemagne, mais dans toute l’Europe. Ce n’est pas qu’aucun document n’ait échappé à sa perspicacité : les mémoires de MM. de Concourt, par exemple, lui auraient fourni d’intéressantes observations, et, parfois, de précieux appuis. Mais M. Œ.-N. a rassemblé tant d’observations, et il les a interprétées avec tant de prudence, qu’il serait injuste de lui reprocher quelques omissions.

L’ouvrage de M. Œ.-N. se compose de six chapitres, et d’un appendice.

I. Définitions. — Deux traits caractérisent l’imagination : 1o elle est de nature intuitive (Anschaulichkeit), et ses intuitions sont toujours des nouveautés ; 2o elle est une spontanéité ; M. Œ.-N. entend par là « la prédominance de causes internes, qui a pour effet l’apparition de phénomènes psychiques ». M. Œ.-N. ne pense pas que l’imagination s’explique par l’association des idées. Il détinit celle-ci avec raison, la liaison de représentations ou de’sentiments qui autrefois se sont présentés chacun séparément. Il ne croit pas qu’on puisse ramener l’association par ressemblance à l’association par contiguïté. Toutes les fois, en effet, que l’on suppose une réduction de cette sorte, on imagine que l’élément commun aux deux groupes de phénomènes associés par ressemblance, peut se séparer des éléments dissemblables de l’un et de l’autre groupe : l’association par ressemblance ABCD DEFG, est, dit-on une association par contiguïté, car elle se produit parce que D, contigu à C et par là à ABC, a été contigu aussi, autrefois, à E, et par là à EFG. Mais cela même prouve que, si les deux représentations associées par ressemblance sont des continus, ne comportant aucune division, leur association ne saurait s’expliquer par la présence simultanée d’un élément dans l’une et dans l’autre représentation. Ainsi l’asso-