Page:Revue philosophique de la France et de l'étranger, XXX.djvu/351

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
341
g. tarde. — le délit politique

yeux : l’influence dominante des capitales, et des capitales les plus renommées, Rome, Florence, Milan, Gênes, Parme, etc. Quant à y voir éclater en traits lumineux, comme on nous l’assure, l’influence de la race étrusque ou grecque et des pays de collines, j’avoue être atteint d’une cécité complète à cet égard. En somme, Jacoby est pleinement confirmé par Lombroso, que celui-ci le veuille ou non.

Celui-ci tranche avec trop de désinvolture cette obscure question des origines du génie. Quand on considère, par exemple, en ce qui concerne la musique, que les peuples de même race et de même latitude, Angleterre et Allemagne, Italie et Espagne, diffèrent profondément, pendant que des peuples de races et de latitudes différentes, Italie et Allemagne, Espagne et Angleterre, présentent un degré à peu près égal d’aptitude ou d’inaptitude ; quand on sait que le don de la composition musicale s’est communiqué du midi au nord, de la race italienne à la race allemande, après avoir émigré de la Grèce et de l’Orient, maintenant stériles, à Rome et à l’Occident chrétiens, seuls féconds aujourd’hui ; il paraît assez difficile d’accorder au célèbre professeur de Turin que « l’influence du climat volcanique et de la race latine » est manifeste, et que la supériorité des conditions atmosphériques et climatériques sur toutes autres est indubitable[1] ; À chaque page, je m’étonne d’assertions telles que celle-ci : « tous les pays de plaine, Belgique, Hollande, ou ceux qui, encaissés dans de hautes montagnes, sont sujets au goitre et au crétinisme endémiques, comme la Suisse et la Savoie, sont dépourvus d’hommes de génie ; le petit nombre de génies que compte la Suisse sont nés…, etc… » Peut-on oublier à ce point le merveilleux épanouissement de la peinture et de la marine hollandaises, du génie hollandais sous toutes ses faces en cette trop courte phase historique où les circonstances l’ont déployé ? Quant à la Suisse, je tenais pour démontré, après l’ouvrage si souvent cité de M. de Candolle sur l’hérédité des capacités scientifiques, autre chef-d’œuvre d’analyse, que le petit peuple helvétique avait fourni un contingent de grands hommes de science vraiment extraordinaire, eu égard au chiffre de sa population. M. de Candolle, non seulement a prouvé ce fait, mais l’a expliqué, et, tout naturaliste éminent qu’il est, lui aussi, il en a trouvé les raisons dans des conditions de famille, d’éducation, de mœurs, qu’il énumère judicieusement. Est-ce parce que Florence est entourée de collines et Pise en pays plat, que la première a été si féconde en génies, du moins jusqu’au xviie siècle, et Pise si improductive ? Avant tout, il faut se rappeler la longue hostilité de ces

  1. Voy. Uomo di genio, p. 118 et s.