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LE DÉLIT POLITIQUE


I

Expliquer la criminalité par des causes générales et non simplement par des circonstances particulières, ou plutôt par des circonstances particulières qui consistent en interférences des causes générales : telle est la tâche à laquelle se sont voués les nouveaux criminalistes. Et l’on ne doit pas trouver surprenant que, après avoir essayé de faire prévaloir cette explication en ce qui concerne la criminalité de droit commun, M. Lombroso se risque à l’appliquer au délit politique lui-même. Le malheur est que sa foi obstinée au type criminel, qu’il croit avoir découvert, en dépit des faits contraires, fausse assez gravement sa manière d’entendre les causes générales dont il s’agit. Pour lui, elles sont, avant tout, sinon exclusivement, d’ordre physique ou physiologique. Encore, tant qu’il s’est borné à étudier des meurtriers et des voleurs vulgaires, son point du vue a-t-il pu se soutenir. Mais, dans son dernier ouvrage[1], il l’étend aux délinquants politiques, comme s’il avait voulu, en tirant lui-même les dernières conséquences de ses principes, en faciliter la réfutation. Alors même, en effet, que la prépondérance des causes d’ordre social dans la délictuosité ordinaire serait contestable ou improbable, ne semblet-il pas qu’elle devrait rester hors de toute contestation en fait de déhctuosité politique, d’excès produits par l’esprit de sédition et de révolte ? Si l’on en pouvait douter, il suffirait de lire le livre dont je parle ; et c’est à ce titre principalement, malgré la multiplicité et çà et là la justesse profonde de ses aperçus, qu’il mérite d’être examiné. Je crois inutile cependant d’en faire l’examen minutieux et méthodique ; je ne m’attacherai qu’à quelques-uns des innombrables sujets sur lesquels il morcelle et pulvérise l’attention du lecteur. Notez qu’il y a là 17 chapitres hachés menu en 187 subdivisions, si j’ai bien compté, ayant chacune son étiquette ; le tout dans le plus

  1. Il delitto politico, e le revoluzioni (Turin, frères Bocca, 1890).