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a. espinas. — les origines de la technologie

pace et concevoir le lieu comme un ensemble de rapports moralement neutres, indifférents au bonheur ou au malheur de l’homme.

Dans la technique de la mesure du temps, on peut distinguer deux parties, la détermination des unités similaires et la détermination des périodes variables.

Comment, par l’observation des phénomènes astronomiques et météorologiques les plus saillants, se constituent les éléments de l’année et l’année elle-même, c’est ce que nous n’avons pas à rechercher ; bornons-nous à constater que cette détermination se fit antérieurement à la période physico-théologique d’une manière socialement inconsciente, c’est-à-dire sans qu’aucune tradition s’établit à ce sujet. Mais peu à peu, comme on avait remarqué que certaines heures et certains jours sont propres à certains travaux, d’autres impropres, en raison des influences météorologiques, et que ces influences étaient divines, on conçut l’idée que tous les jours étaient soumis à l’empire d’une divinité bienfaisante ou redoutable. Il devenait dès lors d’une souveraine importance pour l’action de savoir d’abord quelles étaient les propriétés des heures et des jours ; lesquels étaient « heureux », lesquels « malheureux », et ensuite ce que les dieux prescrivaient ou défendaient d’y faire. Nulle observation ne pouvant, en effet, être tentée en cette matière qu’aux risques et périls de l’observateur, il était naturel qu’on s’en rapportât là-dessus aux enseignements divins. Or les dieux avaient manifesté leur volonté sur ce point avec la dernière précision. Non seulement on savait quelles fêtes solennelles devaient être accomplies dans les divers mois ; mais encore chaque jour avait sa physionomie propre et comportait des opérations spéciales. À Athènes, le premier et le septième jour du mois étaient consacrés à Apollon, le second était le jour du bon génie (ἀγαθοῦ δαίμονος), le troisième appartenait à Athênê, le quatrième se partageait entre Mercure et Hercule, le sixième, placé sous l’invocation d’Artémis, était un jour heureux parce que c’était ce jour-là que les dieux avaient vaincu les Géants ; le huitième était sous la protection de Thésée et de Poséidon ; le trentième, le jour d’Hécate, appartenait aux divinités infernales. De là des obligations définies marquées pour chacun d’eux. Mais si l’on veut voir jusqu’à quel point ces obligations enchaînaient (ou soutenaient) dans le détail le plus menu l’activité des petites gens, il faut lire dans Hésiode le tableau des occupations et des dispositions d’esprit convenables à chaque jour d’après les prescriptions de Jupiter. « Tel est comme une marâtre, tel autre comme une mère[1]. »

  1. Op. et D., vers 825.