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livre est consacré à l’étude des lois de l’imitation. Cependant, il y a bien de l’imitation, jusque dans le fait même de l’invention, il y a surtout de la suggestion et de l’harmonie sociale.

D’ailleurs, je ne voudrais pas qu’on se méprit sur la portée de mes critiques. Je sais que mes objections sont en harmonie avec quelques-unes des principales idées de M. Tarde lui-même, idées indiquées çà et là, plutôt que développées dans son nouveau livre. Il ne faut pas oublier que ce livre ne nous donne pas l’ensemble complet des vues de l’auteur sur la sociologie : peut-être un nouvel ouvrage, dont la publication me paraît à tous égards désirable, ferait-il disparaître certaines objections ou plutôt montrerait-il que ces objections portent moins sur les idées d’ensemble de l’auteur que sur la manière dont il les a présentées ou groupées, subordonnées les unes aux autres. Je regretterais fort, en tout cas, qu’on vît dans la longueur de cette discussion autre chose qu’un signe de grande estime pour le talent de M. Tarde et le mérite de son livre.

Fr. Paulhan.

Le P. J. de Bonniot, S. J. L’ame et la physiologie. 1 vol.  in-8o, 532 p., chez Rétaux-Bray, 1889[1].

Le but que s’est proposé le P. de Bonniot n’apparaît pas bien clairement à la lecture de son livre. Est-ce la réfutation du matérialisme ? Est-ce celle de l’idéalisme berkeleyen ? Probablement l’un et l’autre à la fois. Dans tous les cas, les deux réfutations sont entremêlées d’une manière qui ne laisse pas de dérouter fort le lecteur habitué à distinguer nettement les deux doctrines que l’auteur a en vue.

L’ouvrage est divisé en deux livres, dont le premier a pour titre : les Facultés de la connaissance, et le second ; l’Activité humaine. Les cinq premiers chapitres du premier livre ont pour objet bien marqué la défense du spiritualisme contre le matérialisme. Après un exposé sommaire des principales données de la physiologie, l’auteur passant en revue les différentes fonctions de l’intelligence suivant leur ordre de complexité croissante, examine si la sensation d’abord, puis l’imagination, puis enfin l’intelligence proprement dite, peuvent dériver de l’organisme seul.

Cela fait, par un mouvement de retour qui surprend quelque peu, il étudie les organes des sens. Ensuite il discute les théories psychophysiques sur la mesure des sensations, et la loi de Fechner (qu’il attribue à Weber) ; puis il passe successivement en revue les questions du siège des sensations, de la perception, du plaisir et de la douleur, et de la mémoire. Dans cette seconde moitié du premier livre, c’est l’idéa-

  1. Cet article était imprimé avant la mort du P. de Bonniot. (Note de la Direction.)