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a. binet. — l’inhibition

exemple la conscience du degré de convergence des deux axes oculaires, le degré de l’effort d’accommodation, la grandeur de l’angle visuel, quand l’objet est connu, la perspective aérienne, la distribution des ombres, et enfin et surtout la différence des deux images perspectives des deux yeux.

Il semble résulter de ce qui précède que la perception du relief se fait mieux dans la vision binoculaire que dans la vision monoculaire, car dans le premier cas peuvent se rencontrer deux signes importants du relief qui manquent au second cas ; je veux dire le degré de convergence des axes oculaires et la différence perspective des images.

Nous avons cependant pu constater un jour par hasard qu’il y a des conditions où la perception du relief est plus nette pour un œil que pour les deux yeux. Le fait nous paraît tellement gros qu’il a dû déjà être observé. Quoi qu’il en soit, on peut facilement répéter l’expérience ; il suffit de prendre un dessin plan, par exemple une photographie, et de la regarder successivement avec un seul œil ouvert et avec les deux yeux ; le relief est beaucoup plus apparent avec un seul œil ; on voit alors les premiers plans de la photographie qui paraissent se détacher du papier et se localiser dans l’espace. Quand on ouvre l’autre œil, ces premiers plans, qui semblaient projetés en avant, sont rabattus en arrière. Comme cette expérience porte sur une impression subjective, qui peut être personnelle, j’ai soumis à l’épreuve une trentaine de personnes ; je leur ai montré la photographie, et je les ai priées de me dire s’il y avait une différence suivant qu’on la regardait avec un œil ou avec deux. Très peu de personnes, trois ou quatre seulement, ont, sans aucune solhcitation, découvert qu’il s’agissait du relief et qu’il était visible surtout dans la vision monoculaire. Les autres personnes n’ont pas compris quelle différence il fallait chercher à découvrir ; mais dès qu’on les a mises sur la voie en leur demandant dans quel cas le relief était le plus net, ces personnes ont toujours répondu que c’était dans la vision monoculaire. Deux personnes seulement n’ont pas trouvé de différence. Aucune n’a jamais dit que le relief lui parût plus considérable dans la vision binoculaire.

J’ai été très frappé de l’accord des réponses, dont la plupart émanent de personnes sans culture intellectuelle ; je n’aurais jamais cru, à première vue, qu’on fût aussi unanime à percevoir une différence qui me paraît assez minime, quoique je m’en sois aperçu le premier.

Au cours de ces recherches, j’ai relevé la façon très diverse par