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ANALYSES.delbœuf. Magnétiseurs et médecins.

introduction à la physique, à la géométrie et à l’algèbre, était faite pour grouper autour d’elle les grammairiens, les économistes, les jurisconsultes, les physiciens, les géomètres, en un mot, les savants de toutes les catégories et de toutes les provenances ; elle devait être et elle fut pour un temps ce que le positivisme, qui n’est que le condillacisme renouvelé, tend de plus en plus à devenir, de nos jours, la philosophie des esprits livrés aux travaux scientifiques » (p. 294).

Avec les doctrines dissidentes nous rentrons un peu dans le sujet des trois autres volumes de M. Ferraz, aussi en dirons-nous peu de chose. Signalons seulement l’histoire fort complète de l’introduction du kantisme en France où il y a beaucoup à apprendre même après la savante introduction que M. Picavet a mise en tête de sa traduction de la Morale pratique de Kant. C’est un des chapitres les plus intéressants du livre, et cette histoire mériterait d’être continuée jusqu’à nos jours. Le Kant de Villers, celui de Cousin, celui de M. Renouvier ne sont pas un seul et même Kant, tant s’en faut. Quant au mysticisme de Saint-Martin, il avait déjà été l’objet d’études fort complètes, et M. Ferraz lui-même avait déjà à peu près tout dit sur J. de Maistre et de Bonald. La conclusion de l’ouvrage est un brillant parallèle entre l’esprit du xviiie siècle et celui du xixe : nous ne pouvons mieux terminer qu’en renvoyant le lecteur à ces pages si pleines et si éloquentes dont la dernière phrase indique clairement le sens général et l’inspiration : « Tout ce mouvement d’idées nous a paru digne d’être étudié, parce qu’il marque la fin d’une période et le commencement d’une autre ; parce que les doctrines les plus opposées s’y montrent dans leurs développements et dans leurs conflits, en attendant qu’un spiritualisme large et libéral prenne le dessus au sein d’une doctrine supérieure ».

On voit que le nouvel ouvrage de M. Ferraz est en tout point digne de ses aînés : style élégant et attachant ; analyses exactes, complètes et toujours de première main ; vaste et sûre érudition ; telles sont les qualités qu’il possède en commun avec les trois volumes qui l’ont précédé, mais dont il est comme la préface et l’introduction. Il n’est pas besoin d’ajouter qu’on y retrouvera le même souffle de libéralisme sincère et de spiritualisme convaincu.

Alexis Bertrand.

Delbœuf. — Magnétiseurs et médecins. Alcan, 1890, in-8o, 115 pages.

Brochure de combat. M. Delbœuf, toujours aussi ardent batailleur que travailleur infatigable, rompt ici une longue lance contre M. le Dr Ladame à propos de Donato et des représentations publiques d’hypnotisme. L’autorité doit-elle interdire ces exhibitions ? La loi doit-elle octroyer aux seuls médecins le monopole d’hypnotiser leur prochain ? Sur ces deux points, M. Ladame, avec la plupart de ses confrères, dit oui ; M. Delbœuf dit non. Ce dernier appartient à la vieille école libé-