Page:Revue philosophique de la France et de l'étranger, XXIX.djvu/583

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
571
g. sorel. — contributions psycho-physiques

de côté ; on a eu les saillies en ajoutant deux fois 7 pouces ; les diamètres des grosses colonnes ont un 1 pied 3 pouces 6 lignes, etc. Les arcs ogives ont 1 pied de largeur, les doubleaux 21 pouces ; la hauteur des colonnes est de 16 pieds du sol au chapiteau et de 14 pieds 7 pouces en partant de la base ; du chapiteau aux colonnettes du triforium on compte 12 pieds et le triforium a 9 pieds, etc. De pareilles combinaisons ne peuvent éveiller dans l’esprit du spectateur aucune idée de proportions ou de beauté. Il faut même remarquer que tout le système deviendrait incompréhensible si on mesurait les dimensions avec d’autres unités que celles des architectes du monument. C’est là un point très important découvert par M. Aurès ; dans les monuments antiques, il faut, suivant les circonstances, employer le pied grec ou le pied italique, avec leurs systèmes spéciaux de division. Si on procède autrement, on rend[1] indéchiffrable tout le système « harmonique de l’ancienne architecture ».

Les méthodes employées au moyen âge et si habilement décrites par Viollet-le-Duc offrent le même caractère que celles de l’antiquité : elles servent et ne commandent pas l’architecte[2]. Il faut reconnaître, de plus, que les réseaux triangulaires ont pour effet de donner aux constructions un air de famille, qui ne doit pas être négligé dans l’appréciation esthétique d’une méthode. Ils avaient, tout au moins, l’avantage d’empêcher l’imagination de l’artiste de trop s’aventurer, en le forçant à suivre un système uniforme de recherches, pour tout l’ensemble de son travail ; c’est bien là quelque chose.

Viollet-le-Duc dit fort bien[3] : « On reconnaîtra, pour peu qu’on ait pratiqué l’architecture, qu’il n’est pas inutile d’avoir par devers soi certaines règles fixes, qui, dans maintes circonstances, vous épargnent des tâtonnements et des incertitudes sans fin. » Nous nous sommes assuré que les dessinateurs arrivent à manier ces procédés avec une remarquable dextérité et à en tirer un excellent parti pour l’étude des détails.

Au moyen âge il fallait produire beaucoup et vite, avec un personnel très peu important ; il ne fallait négliger aucun moyen auxiliaire. On avait été conduit à adopter des tracés géométriques même pour la peinture et la sculpture ; il est probable que ce n’était pas une nouveauté et Viollet-le-Duc dit que les anciens Grecs avaient employé des procédés analogues[4].

Ce serait bien mal comprendre la question que de supposer une

  1. Viollet-le-Duc, Dictionnaire, t.  VIII, p. 522.
  2. Dictionnaire, t.  VIII, p. 522.
  3. Dictionnaire, t.  VIII, p. 522.
  4. Dictionnaire, t.  VIII, p. 269.