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qui donnent une idée de l’esprit et de la méthode de l’auteur, car l’analyse de son étude analytique nous entraînerait trop loin. Au surplus, M. Varona, au terme de ses investigations, va nous en indiquer les solides résultats avec sa netteté et sa précision habituelles :

« Loin d’isoler l’homme et de le doter d’une sorte de catégorie mystérieuse, appelée la raison pratique, qui nous permettrait de déduire toutes les lois morales, c’est-à-dire, loin de supposer déjà nés les sentiments moraux dans leur intégrité et d’en suivre l’application, ce qui a été la méthode de quelques moralistes contemporains pour établir la science, nous avons été droit aux faits. Nous avons vu l’homme, unité sociale, soumis aux actions et réactions de l’agrégat dont il fait partie, et répétant bientôt dans son esprit comme une répercussion de tous ces chocs. Nous avons analysé un à un les éléments du milieu où il était placé, et un à un les éléments dont il était formé, et déterminé les influences de ces éléments et de leurs résultats dans sa conscience. Nous avons vu que tout ce travail d’élaboration nous donnait pour résultat la constitution et le perfectionnement d’une classe d’états émotionnels qui amènent des actes et des jugements divers, tous marqués d’un caractère spécial. Ce caractère, c’est la moralité, ayant pour conditions la solidarité. La conduite humaine était ainsi déterminée par une grande loi sociale, et nous pouvions déjà donner pour résolu notre problème. Passant alors au procédé synthétique, nous avons vu comment la conscience de ce principe de subordination nous offre, dans l’individu et dans la société, tous les caractères que l’observation seule avait découverts dans les sentiments, actes et jugements moraux. Nous tenions dans notre main la clef de la moralité ; nous avons compris que, procédant du fait social, la morale était sujette aux mêmes transformations que la société. La genèse des sentiments moraux, les conditions de leur développement et de leur perfectionnement, la loi morale, ses caractères et ses conditions, telle a été la fin de nos recherches. C’était tout ce que nous nous étions proposé d’établir. Aller plus loin, jusqu’à la morale pratique, n’était pas dans notre dessein. »

Il n’en est pas moins vrai que, tout en restant ce que l’auteur a voulu qu’il fût, un traité de morale théorique, ce livre ne laisse pas de jeter des clartés sur les applications des principes posés par la théorie. De toute façon, nous croyons qu’il sera très utilement consulté par les maîtres chargés d’enseigner la morale, s’ils ont à cœur de secouer la routine qui pèse encore sur cet enseignement, moitié scolastique et moitié kantien.

Bernard Perez.

F. Masci. Psicologia religiosa : l’animismo primitivo. 67 p. in-8o, Naples, 1886.

Quoi qu’en disent ceux qui considèrent la religion comme un fait