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élément permanent les faits spéciaux de conscience se détachent comme un chant sur l’accompagnement des chœurs.

Nous nous proposons de démontrer qu’une sensation consciente est la traduction en termes de conscience d’une réaction solidaire de toutes les parties de organisme à une impression externe, et que ce qu’on appelle les effets de la sensation sont les causes de la sensation.

En d’autres termes l’état de conscience qu’on considère comme la partie essentielle du phénomène n’est qu’un phénomène tardif qui se surajoute à un émoi physiologique très complexe. Cet émoi physiologique est l’élément primitif, fondamental dont la sensation consciente n’est que l’expression dans l’unité de la conscience. Quant aux actions qui se passent dans le trajet du sens au cerveau, elles ne constituent que l’élément initial, élément indispensable, mais élément modeste dans les causes totales de la sensation.

Une excitation portée sur l’un quelconque des organes des sens provoque immédiatement une réaction totale de l’organisme entier. Elle modifie à l’instant le ton général de la nutrition : en d’autres termes une excitation quelconque provoque automatiquement une accélération rapide ou un ralentissement de la circulation et de la respiration ; elle active ou modère les sécrétions et les excrétions, ou modifie leur nature.

Claude Bernard avait remarqué que la sensibilité gouverne la circulation : elle gouverne non seulement la circulation, mais aussi toutes les fonctions nutritives ; bien plus, nous espérons démontrer qu’elle n’a d’autre fin que celle-là.

Innombrables sont les preuves expérimentales que toute excitation a un retentissement sur l’organisme tout entier. Haller avait observé que le bruit du tambour activait l’écoulement du sang par une veine ouverte. Les belles expériences de Mosso sur la circulation cérébrale prouvent que, même pendant un profond sommeil, un bruit léger provoque un afflux de sang plus abondant au cerveau : « à peine frôlait-on le malade, ou approchait-on la lampe qu’on voyait immédiatement le volume du cerveau augmenter et une saillie apparaître sur le tracé des pulsations cérébrales. » Toujours pendant le sommeil ce un léger bruit, un petit choc, une parole réveillent aussitôt l’activité du diaphragme ». J’ai moi-même plusieurs fois observé que le passage d’un nuage sur le soleil provoque une accélération du rythme respiratoire et du pouls chez un enfant endormi profondément.

Ajoutons à ces faits que, d’après M. Féré, les impressions lumineuses, que les sons, les saveurs influent sur la force dynamomé-