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A. FOUILLÉE.l’évolutionnisme des idées-forces

les données de la formule génératrice que des grains de poussière, sans vie, c’est se condamner à n’introduire la vie et le sentiment que par une négation des principes de contradiction et de causalité.

— Mais, dira-t-on encore, les facteurs réels, les causes objectives peuvent fort bien contenir plus que ne contiennent nos formules. — À la bonne heure, c’est précisément ce que nous croyons pour notre part ; mais alors, ne présentez plus vos formules mécaniques comme des principes suffisants d’explication. Dites : — Puisque la matière devient consciente d’elle-même, il y avait quelque chose, dans les facteurs originels, qui était capable de s’organiser en conscience ; les unités ultimes de la matière étaient des unités d’attraction et de résistance avec quelque chose de plus. — C’est ce quelque chose que vous avez précisément supprimé et que vous avez essayé en vain d’introduire plus tard par une sorte d’escamotage.

Il est donc opposé à la fois au principe de contradiction et à celui de causalité de représenter le mental, soit comme conséquence, soit comme effet de facteurs supposés tout physiques ; d’autre part, un aspect qui n’est ni la conséquence ni l’effet des facteurs initiaux est un phénomène sans cause. Nous revenons ainsi au dilemme déjà posé : — Si le double aspect n’existe que chez les êtres vivants, d’où vient cette exception qui suppose une création ? Si le double aspect existe partout, alors le philosophe évolutionniste ne peut se contenter d’explications purement mécaniques, même dans le monde minéral. Seul le physicien peut le faire : l’étude physique des minéraux et du monde inorganique, en effet, ne roule que sur des relations d’espace et de temps, d’où, par abstraction, on exclut le réel objectif, et aussi le réel subjectif. Mais, dans l’homme, nous ne pouvons faire abstraction de ce fait que l’être existe pour soi : la psychologie ne peut donc être purement mécanique ; encore bien moins la métaphysique et la cosmologie.

II

MONISME EXPÉRIMENTAL DES IDÉES-FORCES. LES FAITS DE CONSCIENCE COMME FACTEURS DE L’ÉVOLUTION.

I. — C’est le besoin d’unité qui a porté les esprits scientifiques à maintenir une seule sorte d’explication, — l’explication mécanique, — tout le long de l’évolution physique et biologique ; mais nous avons vu qu’ils n’ont pas poussé l’unification jusqu’au bout : ils ont laissé subsister le dualisme de l’aspect mental et de la réalité mécanique. Un besoin d’unité plus complet aboutit au monisme.