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facile de faire voir que la beauté des fables de Lafontaine ne tient pas à la cadence du vers (bien que sa prosodie soit très compliquée et très savante), mais au charme que ces récits produisent sur l’esprit.

Je crois donc que l’on fait fausse route quand on veut donner une formule psycho-physique générale des arts. Le problème esthétique ne gagne rien à être posé sous forme de synthèse : on arrivera à un grand progrès lorsqu’on sera parvenu à bien distinguer les parties dont il se compose et à le résoudre en plusieurs problèmes distincts.

Agréez, etc.
G. Sorel.

LE SENS MUSCULAIRE

Monsieur le Directeur,

La polémique qu’avait soulevée il y a quelques années la question du sens musculaire semble se rouvrir. M. Fouillée attaque[1] les conclusions que l’un d’entre nous avait énoncées il y a quatre ans[2]. Nous croyons qu’il n’y a entre lui et, nous qu’un malentendu, et que s’il avait eu connaissance des expériences que nous avons publiées ici même en 1887[3], ce malentendu ne se serait pas produit. Nous n’avons point eu à nous occuper du sentiment de l’effort en général, mais du sentiment de l’effort musculaire, de ce que l’on a appelé le sens musculaire. « Nous accordons, dit M. Fouillée, que le sentiment d’effort musculaire est un sentiment afférent. » Nous n’avons point prétendu démontrer autre chose. L’un de nous écrivait même[4] : « Il importe de distinguer entre deux formes du sentiment de l’effort : le sentiment de l’effort musculaire, comme les travaux de M. W. James et des expériences plus récentes l’ont établi, peut se ramener tout entier à des sensations musculaires et tactiles ; il disparaît chez les anesthésiques. Mais à côté de ce sentiment il en existe un autre, le sentiment de l’effort cérébral… » Nous avons cherché à montrer et nous croyons avoir réussi à montrer que lorsque toute sensibilité superficielle et profonde a disparu, le sujet n’est plus renseigné sur les positions qu’occupent ses membres, ni sur les mouvements qu’ils accomplissent. Le sujet que nous avons eu l’occasion d’observer en 1887, avait perdu toute sensibilité dans la moitié

  1. Le Sentiment de l’effort et la Conscience de l’action (Rev. phil., déc. 1889).
  2. Gley, le Sens musculaire et les Sensations musculaires (Rev. phil., déc. 1885).
  3. E. Gley et L. Marillier, Expériences sur le sens musculaire, avril 1887.
  4. L. Marinier, Remarques sur le mécanisme de l’attention (Rev. phil., juin 1887).