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ANALYSES.p. siciliani. Le questioni contemporanee, etc.

C’est « le problème de tous les temps », et qui ne parut jamais d’une plus pressante actualité que dans le nôtre.

M. Siciliani l’envisage sous les principaux aspects qui ont été considérés par la science contemporaine. Il étudie la liberté dans l’homme à l’état normal, dans sa base psychologique, et par rapport aux différentes doctrines de la philosophie morale ; dans l’homme criminel, considéré par rapport au droit criminel et aux sciences naturelles et psychophysiologiques ; dans l’individu comme sujet d’éducation, et par rapport à la question sociale ; enfin dans l’individu comme personnalité psychique et juridique au milieu du conflit des pouvoirs sociaux. Donnons une idée de la manière dont sont discutés et résolus ces quatre points connexes du grand problème éthico-social.

Aux deux écoles opposées du libertisme et du nécessitisme, toutes les deux métaphysiques et transcendantes, M. Siciliani oppose celle du causalisme psychique, dont la direction est essentiellement critique et expérimentale. La question n’est pas, dit-il, de savoir si la volonté est originairement libre, mais si elle peut le devenir, ni de savoir si la conscience morale est telle à l’origine, mais si elle peut être véritablement capable de moralité. Or, il est certain que la volonté peut arriver à être libre, non parce qu’elle est supérieure et indifférente à tout motif, mais parce que le motif impulseur est un produit à la fois de l’expérience et de l’activité psychique. La volonté, grâce à l’attention réfléchie, à la raison, se fait libre ; et c’est là une des formes les plus élevées de la causalité. Là réside la vraie autonomie ; là est la vraie fonction morale, qui est une fonction relative, sociale, diffuse et altruiste. La nécessité éthique est une nécessité de raison ; seule elle explique et légitime la sereine joie du sacrifice, et donne à l’homme une foi invincible dans le sentiment de la dignité humaine.

Cette doctrine de la causalité psychique paraît à M. Siciliani la seule acceptable au regard de l’imputabilité et de la responsabilité humaines. La doctrine de la liberté réelle, absolue, entraîne inévitablement celle d’une absolue imputabilité. La négation de toute liberté morale implique l’absence de toute imputabilité et, par suite, de toute responsabilité morale dans l’agent. D’un côté, la pénalité est sans fondement : la réparation du mal par le mal n’est pas justice, mais vengeance ; de l’autre, elle se fonde sur l’idée de l’utilité sociale. Ces deux doctrines si opposées sont l’une et l’autre téléologiques, et aboutissent au même résultat destruction de la liberté morale, suppression de la vraie nature psychologique de l’homme. C’est seulement dans la doctrine du causalisme psychique, selon l’auteur, que la peine a sa raison d’être, et son utilité pour les individus et pour la société. Pour être avantageuse, la sanction doit s’appuyer sur l’idée de la responsabilité relative ; l’efficacité de la peine est en raison de la justice, mais de la justice sentie. Elle est ainsi d’autant plus utile qu’elle est plus juste et plus méritée. Elle conserve la société, rétablit le droit, reconstitue l’ordre juridique, offre un vivant exemple à tous, corrige le délinquant, est instrument