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parce que ces idées ne sont point seulement entendues imparfaitement par l’homme, mais pleinement entendues par Dieu, On sait ce que vaut l’argument ; comment une idée qui, pensée par l’homme, est déclarée subjective, devient objective de cela seul qu’elle est pensée par Dieu.

Ne poussons pas plus loin cette analyse. Ne nous arrêtons pas non plus au chapitre final : Difficultés et réponses, où sont indiquées, seulement indiquées un certain nombre d’objections assez graves suivies de répliques. On dirait que l’auteur n’attache pas grande importance à cette partie de son travail et qu’il juge les philosophes ses adversaires trop entêtés pour lui rendre les armes. Peut-être aussi est-il assuré du triomphe fatal de sa doctrine, et se repose-t-il dans cette espérance. En tout cas, il se défend par des raisons assez inoffensives, et plus souvent par des affirmations répétées que par des preuves. Il est bon de se dire à soi-même : « Je vois, je sais, je crois ; » mais, quand on publie ses idées, c’est pour faire voir, pour faire savoir, pour faire croire.

Au demeurant, ce livre a un tort : celui de n’avoir pas été écrit il y a vingt ou trente ans ; de là ses défauts, de là l’étrange impression qu’il nous cause. Toutefois, malgré bien des imperfections, c’est l’œuvre d’un homme convaincu et sincèrement dévoué au triomphe de sa propre cause. D’autres livres partis de sa main n’avaient qu’un but : la défense du spiritualisme. D’autres, sans doute, viendront encore, inspirés par le même esprit de prosélytisme. Plus de rigueur dans la composition, de précision dans le style, plus de discussion et de critique suffiraient peut-être à présenter la doctrine sous un jour tout autre que celui sous lequel elle nous est apparue. Un philosophe devrait ne pas oublier qu’il écrit surtout pour des adversaires ; puisse M. Alaux s’en souvenir quand il mettra de nouveau la main à l’œuvre !

Lionel Dauriag.

Arsène Deschamps. La genèse du scepticisme érudit chez Bayle (Bruxelles, libr. Muquardt).

Ce titre, qui pourrait être plus simple, est celui d’une thèse soutenue devant la Faculté de Liège. C’est comme un chapitre détaché d’une étude d’ensemble sur Bayle, que l’auteur espère pouvoir publier plus tard. Présentement, il se borne à rechercher les origines du scepticisme de Bayle, scepticisme qu’il appelle érudit, en raison du caractère de ses arguments, qui sont puisés de préférence dans l’histoire des systèmes, des opinions humaines, et qui consistent à montrer les contradictions de tous ces raisonnements et de toutes ces doctrines.

Au surplus, pour bien marquer le caractère de ce scepticisme érudit, l’auteur, dans une introduction qui ne manque ni d’élégance ni de finesse, définit les différentes variétés de scepticisme, et il distingue le