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analyses.girard de rialle. Mythologie comparée.

donne M. Girard de Rialle. C’est là le premier degré de la religion. « Plus tard, les individualités théologiques de même nature se sont réunies, se sont condensées en une seule personne, un Dieu personnel et extérieur aux objets qu’il régit. Alors les divinités sont nées et ont été formées à l’image agrandie de l’homme… C’est la période du polythéisme. » De l’étude des mythes américains, l’auteur conclut « que la transformation des idées fétichiques en polythéisme s’est faite dans un ordre régulier et semblable à la transformation de même nature qui s’est opérée en Asie et en Europe ». Le présent volume est consacré au fétichisme et aux religions de l’Amérique. Le second traitera principalement des mythologies sémitique et indo-européenne.

Quand on veut présenter une étude d’ensemble du fétichisme, on se heurte à la difficulté d’introduire dans une masse énorme de faits une division rationnelle. Le fétichisme d’ailleurs se présente lui-même à différents stades de développement. « L’humanité a commencé par concevoir tous les corps de l’univers comme animés d’une vie propre, de volontés et de passions ; parmi ces corps, ceux auxquels elle a prêté le plus d’attention, qui lui ont semblé avoir le plus d’énergie, ont été ceux qui la touchaient de plus près. Plus tard et peu à peu, ces conceptions se sont généralisées, et les grandes données fétichiques ont apparu, pour se transformer bientôt en divinités, en agents extérieurs aux choses et directeurs d’un ensemble de phénomènes et d’êtres, avec lesquels ils ne se confondent plus. »

M. Girard de Rialle ne pouvait essayer de donner l’exposé successif des croyances des nombreuses peuplades qui ont pratiqué et pratiquent encore les religions fétichiques : il a donc groupé ses renseignements sous des têtes de chapitre qui permissent de les retrouver sans peine. Il commence par l’étude du fétichisme dans la nature inanimée : pierres, rochers, montagnes, eau et plantes. Vient ensuite le culte des objets de la nature animée, animaux, oiseaux, serpents ; en troisième lieu, le culte fétichique des mânes, des ancêtres et des esprits. C’est là seulement que nous trouvons les données relatives au culte du feu, de l’orage et du vent, qui, à certains égards, semble indiquer un stade supérieur de développement ; puis le culte des corps célestes, et enfin celui du ciel et de la terre.

Dans la masse énorme des faits qu’a rassemblés M. Girard de Rialle, je noterai ceux qui me semblent mériter une attention particulière. Le culte des pierres, qui joue encore un si grand rôle chez nombre de peuples et dont l’importance est. si remarquable dans les cultes sémitiques, trouve même d.ans les pays civilisés do curieux points d’attache. Sans qu’il soit besoin de remonter au concile de Tours (567), qui ordonne aux prêtres de refuser l’entrée des églises à ceux qui adorent les pierres levées, ou à celui de Nantes, qui, trois siècles plus tard (895), ordonne d’arracher les « pierres diaboliques » qui, dans les forêts et les ruines, sont l’objet d’une a criminelle vénération », nous trouvons autour de nous, dans la Franche-Comté, dans l’Auvergne, dans la Bretagne, dans le Berry,